LE CONGRES DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS DE PARIS


(Traduit d'une lettre de Paris à L'Udbodhana)

 

A l'Exposition de Paris, le Congrès de l'Histoire des Religions s'est récemment tenu pendant plusieurs jours de suite. Il n'y a eu aucune place au Congrès pour les discussions sur les doctrines et les vues spirituelles des religions ; son propos n'était que de s'informer de l'évolution historique des différentes formes de fois établies, ainsi que d'autres faits accessoires. En conséquence, la représentation des diverses sectes missionnaires des différentes religions avait été entièrement laissée de côté à ce Congrès. Le Parlement des Religions de Chicago avait été une grande affaire, et les représentant de nombreuses sectes religieuses de toutes les parties du monde y avaient été présentes. D'un autre côté, à ce Congrès étaient seulement présents des savants qui se dédiaient à l'origine et à l'histoire des différentes religions. Au Parlement de Chicago l'influence des Catholiques romains avait été grande, et ils l'avaient organise avec de grandes espérances pour leur secte. Les catholiques romains espéraient établir leur supériorité sur les protestants sans grande opposition ; en proclamant leur gloire et leur force et en exposant le côté brillant de leur foi devant Chrétiens, Hindous, Bouddhiste, Musulmans et d'autres représentants des religions du monde qui étaient assemblés, en exposant publiquement leurs faiblesses, ils espéraient affermir leur propre position. Mais le résultat s'étant avéré autre, le monde chrétien fut lamentablement sans espoir de réconcilier les différents systèmes religieux; aussi les catholiques romains sont-ils particulièrement opposes à la répétition de tout rassemblement de la sorte. La France est un pays catholique romain ; aussi, en dépit du souhait fervent des autorités, aucun congrès religieux n'a été convoqué du fait de la véhémente opposition de la part du monde catholique romain.

Le Congrès de l'Histoire des Religions de Paris a été semblable u Congrès des Orientalistes qui se réunit de temps en temps et auquel sont conviés les savants verses en sanskrit, en pali, en arabe et dans d'autres langues orientales; seule l'ancienneté du christianisme avait été ajoutée à ce Congrès de Paris.

D'Asie seuls trois pandits japonais étaient présents au Congrès. De l'Inde il y avait le Swami Vivekananda.

La conviction de beaucoup d'érudits occidentaux en sanskrit est que la religion védique est le résultat de l'adoration du feu, du soleil et d'autres objets de phénomènes naturels inspirants la crainte.

Swami Vivekananda a été invité au Congrès de Paris pour contredire cette conviction, et il promit de lire un papier sur le sujet. Mais il n'a pas pu tenir sa promesse du fait d'une mauvaise santé, et il n'a pu qu'être personnellement présent au Congrès, avec difficulté, où il a été très chaleureusement accueilli par tous les érudits occidentaux en sanskrit dont l'admiration pour le Swami était la plus grande du fait qu'il avaient déjà parcouru beaucoup de ses conférences sur le Vedanta.

A Congrès, Mr. Gustav Oppert, un savant allemand, a lu un papier sur l'origine du Shalagrama-Shila. Il a retracé l'origine du culte du Shalagrama à l'emblème du principe géniteur femelle. Selon lui, le Shiva-linga est l'emblème phallique du male et le principe géniteur femelle. Et Il voulait ainsi établir que le culte du Shiva-Linga et celui du Shalagrama sont tous deux les parties constituantes du culte du Linga et de la Yoni ! Le Swami répudia les deux vues ci-dessus et dit que bien qu'il avait entendu de telles explications ridicules sur le Shiva-Linga, l'autre théorie sur le Shalagrama-Shila était tout à fait nouvelle et étrange et qu'elle lui avait semblé sans base.

Le Swami dit que le culte du Shiva-Linga venait de l'hymne fameux de l'Atharva-Veda Samhita chanté en louange au Yupa-Stambha, le pilier sacrificiel. On trouve dans cet hymne une description du Stambha ou Skambha sans commencement ni fin, et il est montré que ledit Skambha représente le Brahman éternel. Et ensuite le feu Yajna (sacrificiel), sa fume, ses cendres et ses flammes, la plante Soma et le boeuf qui été utilisé pour porter sur son dos le bois du sacrifice vbédique ont donné lieu à la conception du corps très brillant de Shiva, etc. , de la même manière le Yupa-Skambha a donné naissance avec le temps au Shiva-Linga, et il a été déifié à la grande Divinité de Shri Shankara. Dans l'Atharva-Veda Samhita, les gâteaux sacrificiels ont aussi été célébrés avec les attributs du Brahman.

Dans le Linga Purana, le même hymne est développé sous forme d'histoires, faites pour établir la gloire du grand Stambha et la supériorité de Mahadeva.

En outre, il y a un autre fait à considérer. Les Bouddhistes avaient l'habitude d'ériger des stupas commémoratifs consacrés à la mémoire de Buddha; et ceux qui étaient très pauvres, incapables de construire de grands monuments, avaient l'habitude d'exprimer leur dévotion envers lui en dédiant des substituts miniatures. Des exemples similaires sont encore vus dans le cas de temples hindous à Varanasi et en d'autres lieux sacrés de l'Inde où ceux qui ne pouvaient pas construire de temples dédiaient à la place de très petites constructions semblables à des temples. Aussi peut-il être tout à fait probable que pendant la période d'ascendance bouddhiste, les hindous riches, en imitation des bouddhistes, avaient l'habitude d'ériger quelque chose comme un mémorial qui ressemblaient à leur Skambha, et d'une manière similaire les pauvres les copiaient sur une échelle réduite, et ensuite les mémoriaux miniatures des pauvres hindous sont devenu une nouvelle addition au Skambha.

L'un des noms des stupas bouddhistes (mémoriaux) est Dhatu-garbha, c'est-à-dire "matrice en métal ". A l'intérieur du Dhatu-garbha, de petites cases faites en pierre, façonnées comme le Shalagrama actuel, étaient utilisées pour préserver les cendres, les os, et les autres restes des bhikshus bouddhistes distingués, avec de l'or, de l'argent et autres métaux. Les Shalagrama-Shilas sont des pierres naturelles qui ressemblent en forme à ces cases artificielles taillées dans la pierre des Dhatu-garbha bouddhistes, et ainsi adorées d'abord par les Bouddhistes, elles sont passées petit à petit dans le Vaishnavisme, comme beaucoup d'autres formes de culte bouddhistes qui ont trouvé leur chemin dans l'hindouisme. Sur les rives de la Narmada et au Népal, l'influence bouddhiste a duré plus longtemps que dans les autres parties de l'Inde; et la coïncidence remarquable, que le Narmadeshvara Shiva-Linga, trouvé sur les rives de la Narmada et de ce fait appelé ainsi, et les Shalagrama-Shilas du Népal ont été préféré par les hindous à ceux trouvé ailleurs en Inde est un fait qui doit être considéré avec respect à ce point de dispute.

L'explication du Shalagrama-Shila comme emblème phallique était une invention imaginaire et, depuis le tout début, à côté. L'explication du Shiva-Linga comme emblème phallique a été avancée par les plus irréfléchis, et a été mené en Inde à son époque la plus dégradée, celle de la chute du bouddhisme. La littérature Tantrika du bouddhisme la plus immonde de cette époque est encore largement trouvée et pratiquée au Népal et au Tibet.

Le Swami a donné une autre conférence dans laquelle il a traité de l'évolution historique des idées religieuses en Inde, et il a dit que les Vedas étaient la source commune de l'Hindouisme dans toutes ses diverses étapes, tout comme du bouddhisme et de toute autre croyance en Inde. Les graines de l'évolution variée de la pensée indienne sur la religion repose dans les Vedas. Le bouddhisme et le reste de la pensée religieuse de l'Inde ne sont que le résultat de l'épanouissement et de l'expansion de ces graines, et l'hindouisme moderne aussi n'est que leur développement et leur forme mature. Avec l'expansion ou la contraction de la société, ces graines sont plus ou moins étendues à un endroit et plus ou moins contractées à un autre.

Il a dit quelques mots sur la priorité de Shri Krishna par rapport à Buddha. Il a aussi dit aux savants occidentaux que, comme les histories des dynasties royales décrites dans le Vishnu Purana était admises petit à petit comme preuves qui jetaient de la lumière sur les voies de recherche de l'antiquité, de même les traditions de l'Inde étaient toutes varies, et qu'il désirait que les érudits occidentaux en Sanskrit, au lieu d'écrire des articles fantaisistes, devraient essayer de découvrir leurs vérités cachées.

Le professeur Max Muller dit dans l'un de ses livres que, quelque soient les similarités qu'il puisse y avoir, tant qu'il ne sera pas démontré qu'un Grec connaissait le Sanskrit, on ne pourra pas conclure que l'Inde ancienne a aidé la Grèce en quoi que ce soit. Mais il est curieux d'observer que quelques savants occidentaux, trouvant plusieurs termes d'astronomie indienne similaires à ceux de l'astronomie grecque, et venant à savoir que les grecs avaient fondé un petit royaume aux frontières de l'Inde, puisse clairement lire l'aide de la Grèce sur tout ce qui est indien, sur la littérature indienne, sur l'astronomie indienne, sur l'arithmétique indienne. Pas seulement cela ; on a été assez hardi pour aller aussi loin que de déclarer que toutes les sciences indiennes, comme une règle, ne sont que des échos des sciences grecques !

Sur un seul Shloka Sanskrit [Sanskrit] : "Les Yavanas sont des Mlechchhas, en eux cette science est établie (donc) ils méritent même le culte comme les Rishis, … ", combien les occidentaux se sont-ils livrés à leur imagination effrénée ! Mais il reste à démontrer que le shloka ci-dessus prouve que les Aryens ont été enseignés par les Mlechchhas.Le sens peut être que l'érudition des disciples Mlechchha des enseignants aryens est louée ici, seulement pour encourager les Mlechchhas dans leur recherche de la science aryenne.

En second lieu, quand le germe de toute science aryenne se trouve dans les Vedas et que toute étape d'une de ces sciences peut être retracée avec exactitude depuis la période védique jusqu'à l'époque actuelle, quelle est la nécessité de forcer la suggestion tirée par les cheveux de l'influence des Grecs sur eux ? " Quelle est l'utilité d'aller sur les collines à la recherche du miel s'il est disponible à la maison ?" dit un proverbe Sanskrit.

En outre, tout mot qui ressemble à du grec de l'astronomie aryenne peut facilement être dérivé de racines sanskrites. Le Swami ne pouvait pas comprendre de quel droit les savants occidentaux devaient retracer ces mots à une source grecque, ignorant ainsi leur étymologie directe.

De la même manière, si, en trouvant mention du mot Yavanika (rideau) dans les drames de Kalidasa et d'autres poètes indiens, l'influence Yavanika (Ionienne ou grecque) influence sur toute la littérature dramatique du temps est constatée, alors on doit d'abord s'arrêter pour comparer si des drames aryens sont tous comme les grecs. Ceux qui ont étudié le mode d'action et le style des drames des deux langues doivent admettre qu'une telle ressemblance, si elle est trouvée, n'est que fantaisie du rêveur obstiné, et qu'elle n'a en réalité jamais existée. Où est ce chœur grec ? Le Yavanika grec est d'un côté de la scène, l'aryen diamétralement de l'autre côté. La manière caractéristique d'expression du drame grec est une chose, celle de l'aryen une toute autre chose. Il n'y a pas la moindre ressemblance entre les drames aryens et les drames grecs; c'est plutôt les drames de Shakespeare qui ressemblent beaucoup aux drames de l'Inde. Aussi la conclusion peut-elle être tirée que Shakespeare est endetté vis-à-vis de Kalidasa et des autres anciens dramaturges indiens pour tous ses écrits, et que toute la littérature occidentale n'est qu'une imitation de l'indienne.

Enfin, retournant l'une des prémisses du professeur Max Muller contre lui, il peut être tout aussi bien dit que tant qu'il n'est pas démontré qu'un hindou connaissait le grec one ne peut même pas parler d'influence grecque.

De même, voir une influence grecque dans la sculpture indienne est tout aussi totalement infondé.

Le Swami a aussi dit que le culte de Shri Krishna était bien plus ancien que celui de Buddha, et que si la Gita n'était pas de la même date que le Mahabharata, elle était sûrement plus ancienne et en aucune manière plus tardive. Le style du langage de la Gita est le même que celui du Mahabharata. La plupart des adjectifs utilisés dans la Gita pour expliquer les matières spirituelles sont utilisés dans le Vana et dans les autres Parvans du Mahabharata, concernant les matières temporelles. Une telle coïncidence est impossible sans l'utilisation plus générale et plus libre de ces mots à une seule et même époque. En outre, la ligne de pensée de la Gita est la même que dans le Mahabharata; et quand la Gita relève les doctrines de toutes les sectes religieuses du temps, pourquoi ne mentionne-t-elle même pas le nom du bouddhisme ?

Malgré les efforts les plus prudents des écrivains postérieurs à Buddha, la référence au Bouddhisme n'est pas supprimée et elle apparaît ici ou là, sous une forme ou sous une autre, dans des histories, des essais et dans tout livre de littérature post-bouddhique. D'une manière cachée ou manifeste, on est certain de rencontrer une allusion avec une référence à Buddha et au bouddhisme. Quelqu'un peut-il montrer une référence de la sorte dans la Gita ? En outre, la Gita est une tentative de réconciliation de toutes les croyances religieuses, aucune d'entre elle n'y est froissée. Pourquoi, reste-il à répondre, est-ce que le bouddhisme est la seule à avoir repoussé le tendre toucher de l'auteur de la Gita ?

La Gita ne méprise obstinément personne. La peur ?, De cela il y a une absence manifeste. Le Seigneur Lui-même, étant l'interprète et celui qui a établi les Vedas, n'hésite même jamais à censurer la présomption imprudente des Vedas si nécessaire. Alors pourquoi aurait-il peur du bouddhisme ?

Tout comme les savants occidentaux dédicacent toute leur vie à un seul ouvrage grec, qu'il dévoue de la même manière toute leur vie à un seul ouvrage sanscrit, et alors beaucoup de lumière coulera sur le monde. Le Mahabharata est particulièrement l'ouvrage le plus inestimable de l'histoire indienne; et ce n'est pas trop de dire que ce livre n'a pas encore été même convenablement lu par les occidentaux.

Après la conférence, beaucoup de ceux qui étaient présents ont exprimé leur opinion ou pou contre le sujet, et ont déclaré qu'ils étaient d'accord avec la plupart de ce que le Swami avait dit, et ils ont assuré le Swami que les anciens jours de l'antiquité sanskrite étaient passés et terminés. Les vues des sanskritistes moderne étaient largement les mêmes que celles que le Swami avait exprimées. Ils croyaient aussi qu'il y avait beaucoup d'histoire véritable dans les Puranas et dans les traditions de l'Inde.

Enfin, l'érudit Président, admettant tous les autres points de la conférence du Swami, n'était pas d'accord sur un seul point seulement, à savoir sur la comporaineté de la Gita avec le Mahabharata. Mais la seule raison qu'il apporta était que les savants occidentaux étaient pour la plupart de l'avis que la Gita ne faisait pas partie du Mahabharata.

La substance de cette conférence sera imprimée en français dans le Rapport Général du Congrès.