ADHYATMA DARSHANAM

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ADHYATMA RAMAYANA
L'Enseignement Spirituel du Râmâyana

 

Chapitre 3

LA MISSION SPIRITUELLE

 

ETAPE 1

Quand l’étincelle de la grâce divine ou la conscience de l’Etre a atteint la maturité, Vishvamitra, la conscience du bien-être universel (le sens de l’altruisme), une force surmentale, fait son apparition.  Avec lui commence la première phase de la mission qui consiste à rétablir l’ordre et la lumière et à marcher vers la libération.  Râma (la supraconscience éclairée, la grâce) et Lakshmana (la vigilance) sont mis à l’épreuve au Tapoloka ou au Tapobhoûmi, le plan surmental de la personnalité (Dasharatha).  Le mot Tapasya signifie la méditation et l'épreuve.  Le Tapoloka, qui correspond au Troisième Oeil[Trikoûti] sur le plan mystique, se situe entre les deux sourcils dans le corps physique.  Ici, les deux frères ont à faire face à Tâtakâ (la conscience inférieure [démoniaque] limitée au corps, à la famille ou au clan), Soubâhou (l’identification ou l’attachement au corps, à la famille ou au clan qui génère les préjugés) et Mâricha (l’illusion d’être un individu corporel ou de n’être que le membre d’un clan ).  La grâce supraconsciente, vigilante et éveillée (Râma et Lakshmana) se libère de Tâtakâ et Soubâhou en les éliminant de la conscience méditative, et réprime Mâricha vers l’inconscient (Lankâ).  Et ainsi, ils protègent le yagnya (l’épanouissement) du sage Vishvamitra, facilitant de cette manière l’expansion de la conscience universelle au niveau du surmental.  Cette victoire constitue une première libération provoquée par la Grâce.

La supraconscience éveillée (Râma et Lakshmana) sous l’inspiration de la conscience universelle (Vishvamitra) part au Siddhâshrama, le centre du troisième oeil qui garantie la réussite[Siddha] et la protection[âshrama].  Ici, Râma restitue la pureté originelle de Ahalyâ [le cœur spirituel], qui a été abusée par l’esprit inférieur (Indra- le mental) à la recherche du plaisir et du pouvoir.  Il est intéressant de remarquer que le précepteur de Indra s’appelle Brihaspati.  Brihat veut dire Grand tandis que Pati signifie Seigneur.  Donc, l’esprit inférieur, le mental, est toujours motivé par le souci de préserver sa propre grandeur et souveraineté.  Son monde est centré autour de ce but égoïste. Après l’abus, Ahalyâ a été condamnée à devenir insensible et inerte comme un rocher.  La morale de l’histoire d’Ahalyâ est qu’un esprit inférieur qui court après le plaisir et la grandeur ne fait qu’endurcir son cœur et sa sensibilité.

Il faut également souligner que Ahalyâ correspond à la connexion mystique entre le Agnya Chakra [Trikûti] et la medulla oblongata.  Le mari d’Ahalyâ s’appelle Gautama Rishi, qui signifie l’espace intérieur mystique[Gau] obscur [tama] que l’on voit en fermant les yeux.  Dans cet espace mystique obscur, le yogi doit maintenir un état d’esprit chaste après avoir éliminé la limitation, l’identification et l’illusion.  Il doit à tout prix préserver cet espace des assauts de l’esprit inférieur [Indra].  C’est en faisant cela que le cœur spirituel du yogi s’activera et lui donnera la capacité de voir ce que les autres ne peuvent voir et là où les autres ne voient pas.  Ceci est illustré par le fait qu’après le repentir de Indra, ce dernier est béni de milles yeux.  Une façon d’activer le centre mystique consiste à maîtriser une posture yoguique (Siddhâsana) et à pratiquer le Trâtaka avec les yeux.  Notez bien comment le nom de Tâtakâ ressemble à cet exercice.  Est-ce une coïncidence?  Une autre méthode consiste à presser sur le centre du Trikûti d’une façon bien particulière [Bhru-madhya dhâranâ].

Les adeptes du Yoga nous assurent qu’après avoir maîtrisé le Siddhâsana et le Trâtaka, le corps du yogi devient plus ferme, souple, sain et léger[Subâhu].  Ensuite l’esprit devient aussi clair qu’un miroir [Mâricha] qui peut pénétrer jusqu’au fond de l’inconscient [Lankâ].  Après la réhabilitation du cœur spirituel [Ahalyâ], la supraconscience éveillée (Rama et Lakshmana) s’arment et se renforcent d’avantage au Siddhâshrama du Tapoloka avant de descendre vers le pays de Videharâja Janaka ou le Janaloka.

Videha signifie sans(Vi) corps(deha) ou sans forme, un autre état de conscience méditative où la conscience du corps est délaissée et où l’on pénètre dans la source de l’humanité et de la conscience humaine (Janaka ou le champs adamique ou mânavique subtil).  Cette source subtile et immense se trouve au fond de la conscience de chaque individu.  Dans la Bible, cette source est appelée Adam tandis que dans les Védas, elle se nomme Manu.  Ici, la supraconscience éveillée découvre la pure conscience humaine (Jânakî-le Moi pur), qu’il avait fallu déterrer du fond de la conscience matérielle (la terre) grâce à la charrue du discernement (Sîta).  Sa découverte apporta la gloire et le renom à Janaka (la conscience humaine) et combla son monde (Puri) de bonheur (Mithilâ).  Sîtâ comporte en elle-même deux aspects: un niveau inférieur car elle est issue de la matière ou de la terre [Valli], et un niveau supérieur puisqu’elle est aussi une incarnation de la Puissance Divine (Lakshmî ou Devasenâ).

Entre ces deux aspects de Sîtâ, il y a une barrière, un obstacle structurel représenté par l’arc de Rudra, aussi appelé Rudragranthi dans le jargon mystique.  Rudra signifie le temps (Kâla) et la structure matérielle (Bhava ou Bhûta), qui emprisonnent la conscience dans une certaine structure.  Rudra est aussi celui qui a conservé le poison de la destruction dans sa gorge.  Cet obstacle de dualité qui est imposé par Janaka, la condition humaine, se situe effectivement au niveau de la gorge; sur le plan occulte il est appelé Vishuddha Chakra.  Vishuddha Chakra signifie la roue qui purifie ou le centre mystique de la purification.  Physiquement, l’obstacle est représenté par la clavicule, qui ressemble à un arc.  Il n’y que la supraconscience ou la grâce divine( Avatâra Râma) qui peut briser cette barrière[du temps et de la structure] afin de générer un nouvel état de conscience spirituelle unifiée, pure, indestructible et puissante (Sîtâ Râma).  Les autres rois concurrents, incluant même le grand Râvana, venus de différents pays ou états de conscience inférieure n’ont pas pu enlever cet obstacle.  Comme disent les Soufis: la porte de l’éternel ne s’ouvre que de l’intérieur et la clé est entre les mains de Dieu.  L’esprit de l’homme ne pourra jamais l’ouvrir malgré toute sa puissance et son intelligence.

Après l’élimination de la barrière, c’est la fusion assurée entre les deux aspects de la conscience humaine (Sîtâ).  A ce stade, le yogi ressent une première montée d’énergie psychique qui procure une très grande joie.  Ensuite, survient la proposition de mariage entre la pure conscience humaine (Sîtâ- innocence) et la supraconscience dans le pays de Videha, l’état sans frontière.  C’est ici également que les trois frères (aspects) de Râma rencontrent leurs épouses ou shaktis respectives, toutes les sœurs (aspects) de Sîtâ.

L’avènement de cette nouvelle supraconscience pure et puissante contraint l’ancienne conscience humaine, Parashourâma- la conscience exigeante et implacable, à s’exiler et à s’effacer.  Parashurâma est, en quelque sorte, le conscient humain supérieur [Bhârgava: le sur-moi] de Dasharatha.  Il a toujours agit de manière à préserver la prédominance de la connaissance spirituelle [Brâhmana] sur la recherche du pouvoir [Kshatriya] afin de maintenir un certain équilibre dans la personnalité. Suite à la soudaine mutation dans la conscience provoquée par l’élimination de la barrière structurelle, il y a comme une sorte de désarroi.  Parashurâma veut s’assurer si cette mutation serait durable et pourrait prendre la relève.  Il vient mettre la Grâce à l’épreuve et lance un défi à Râma, lui demandant de manier l’arc de Vishnou, c’est-à-dire d’enlever le Vishnou-granthi, qui fait obstacle à la progression vers la libération.  Comme on le sait déjà, Vishnou est l’aspect préservateur, organisateur et libérateur de AUM.  En réussissant cette difficile épreuve, Râma rassure Parashurâma [Vishnou-granthi] et le contraint à se retirer volontairement en offrant toute sa force mystique à Râma.

Trois événements importants se sont déroulés à Mithilâ.  Il y a la destruction de l’arc de Shiva, la fusion entre les deux aspects de Sîtâ et le maniement de l’arc de Vishnou.  Pour le yogi, ces trois événements symbolisent les trois exercices de libération et de conservation d’énergie spirituelle [Bandhas] à accomplir.  Ils sont le Jâlandhara Bandha, le Mûla Bandha et le Uddiyâna Bandha.  Il est préférable de pratiquer ces trois Bandhas sous la supervision d’un instructeur de Yoga.  Le Hatha Yoga Pradîpaka déclare que grâce à la posture yoguique [Siddhâsana] uniquement, le Unmânî Kalâ [absorption dans le silence mystique] est spontanément atteint et avec la perfection de la pratique, les trois Bandhas sont réalisés sans aucun effort.

De Mithilâ, la supraconscience prend sa force dynamique (Sîtâ) et repart à Ayodhyâ.  C’est le premier Samâdhi [Unmânî], le plus grand bonheur spirituel.  Et c’est ici que se termine la première étape spirituelle, après que la grâce divine [Avatâra Râma] soit descendue au Sahasrâra [Satyaloka/Ayodhyâ], ait rétabli l’ordre au Trikoûti ou Tapoloka (en protégeant le yagnya de Vishvamitra et en absolvant Ahalyâ) et s’est fusionnée avec la pure conscience humaine (Jânaki) en traversant  le Vishouddha Chakra au Janaloka.

ETAPE 2

C’est le retour de Sîtâ-Râma à Ayodhyâ et ce sont les premiers bonheurs de la nouvelle conscience divine dans une atmosphère de paix et d’harmonie au niveau de la supraconscience.  Mais malheureusement, l’homme n’est pas constitué qu’uniquement de supraconscient.  Il existe en lui plusieurs états de conscience, inférieures, qu’il faut transformer et purifier avant d’atteindre la libération finale et complète.  Il y a les états conscients, subconscients et inconscients, les états d’esprit positifs, neutres et négatifs.  La tâche de transformer et de libérer chaque état de conscience et chaque état d’esprit doit être accomplie par la grâce (Râmâvatâra), la vigilance spirituelle (Lakshmana) en compagnie de la pure conscience humaine (Jânaki) avec l’aide précieuse de la foi et du dévouement exclusif (Hanoumân).  Et puisque cette grande tâche n’a pas encore été entreprise, il est donc prématuré de célébrer l’émancipation finale.  L’Ayodhyâ ou le supraconscient de Dasharatha n’est pas encore un royaume parfait.  D’où l’annulation légitime du couronnement de Râma.  Si on suit bien la logique du Râmâyana, on arrive à la conclusion que le Samâdhi n’est pas une finalité mais le début d’un long et difficile cheminement vers la fusion dans l’Être Suprême.  Le Samâdhi, rappelons le, est l’état d’absorption du moi pur momentanément dans l’Être Suprême.

Une épithète de Râma est Kodanda-Pâni, c’est-à-dire celui qui détient l’arc ou l’arme ou l’autorité de punir (Danda/Mâra) tous ceux qui sont les agents du mal et de l’ignorance(Kou/ Ko).  En unissant Ku et Mâra, on arrive à Kumâra, le libérateur.  Ceci nous donne une indication très claire que la Grâce divine n’est pas comme une sorte de lumière passive mais belle et bien une force dynamique et concentrée.


ETAPE 3

C’est l’étape décisive où les aspects négatifs de l’esprit sont portés à l’attention de Râma.  Cette étape équivaut au brusque réveil de Gautama Bouddha aux souffrances de l’existence.  Kaikeyi, la vision optimiste et le besoin de la sécurité, est momentanément subjuguée par son ombre tordu, Mantharâ (le souci ou l’insécurité) et c’est la résurgence de la négativité et de l’incertitude.  Comment peut on ressentir la sécurité absolue alors que les forces de l’anarchie (Nishâcharas) hantent toujours la conscience.  Kaikeyi et Mantharâ constituent les forces responsables de provoquer l’exil ou la descente de Râma, Lakshmana et Sîtâ dans la forêt -dans le champs de la conscience diversifiée et divergente - afin d’éliminer la négativité.  Dasharatha Râja doit se plier à cette exigence de laisser triompher l’ordre et la paix à tous les niveaux de sa personnalité.  La prise de conscience de l’existence des forces de l’obscurité l’affaiblit et le relègue à l'arrière-plan et c’est à présent à Râma de prendre la relève.

En appelant Râma constamment et en rendant l’âme après le départ de Râma, Dasharatha nous démontre qu’il est inséparable de Râma, qui est son âme et sa raison de vivre.  La mort de Dasharatha après le départ de Râma indique aussi qu’il a quitté Ayodhyâ et accompagnera Râma dans une forme subtile pendant tout son exil.  Par ailleurs, elle attire notre attention sur le fait que l’harmonie et l’ordre ne règnent plus et que la descente de Râma va graduellement et certainement le rapprocher de Râvana.  C’est à présent au tour de Dashamoukha Râvana (l’ego, l’inconscience personnelle qui engendre le désordre et la dégradation, le trou noir psychique) de venir à l’avant-plan.Dashamukha ou Dashagrîva signifie celui dont la tête(moukha-le visage et l’esprit) est complètement sous l’emprise des dix sens.  C’est la raison pour laquelle il a dix têtes, qui s’agitent dans tous les sens.  Dashamukha est l’opposé de Dasharatha ; il est plus précisément la conscience brute et inférieure de Dasharatha qui habite au fond de l’inconscient.  Il est le symbole de l’arrogance, du plaisir, de l’irrévérence et de l’insoumission.

L’histoire de la mort accidentelle de Shravana Koumâra  reflète la loi du Karma [la loi de la cause et de la conséquence] qui n’affecte pas uniquement la personne impliquée dans l’offense mais également tous ceux qui sont liés à lui.  C’est une vision un peu plus large du Karma dans le sens que les karmas des gens affectent la société et même les générations à venir.  Une personne meurt mais son karma reste et continue à influencer le monde.

Il est intéressant de noter qu’au moment de l’exil ni Bharata ni Shatrughna sont là.  La raison pour cela est assez simple: ils constituent les forces qui sont destinées à maintenir la Grâce ou le rayon de la conscience divine (Râma) au niveau de la conscience supérieure (Ayodhyâ) à tout prix.  Râma doit donc automatiquement partir en leur absence, plus précisément à leur insu. Par contre, Lakshmana et Sîtâ consentent à suivre Râma dans les bois par ce qu’ils sont indissociables de Râma, quel que soit le niveau de conscience dans lequel l’Être se trouve.  Les quatorze ans d’exil prononcés par Kaikeyi représentent l’allée et le retour de la Grâce en passant à travers les sept niveaux de la conscience ou les sept Chakras ou Lokas [centres ou stations mystiques].

Râma, Lakshmana et Sîta doivent abandonner leurs ornements royaux et porter les vêtements des ermites.  Ceci indique la nécessité de rester simple et austère avant d’entamer la mission spirituelle où toutes les choses matérielles, externes et inutiles sont rejetées.  Cette simplicité est le signe distinctif des Yogis, Mounis et sages surtout après l’expérience du Samâdhi.  Le Hatha Yoga Pradipaka explique que le yogi, qui s’adonne régulièrement à la pratique yoguique [Siddhâsanâ- bhyâsâd] pendant douze années, doit méditer sur l’Être, le Soi [Atma-dhyâyî] et prendre un simple repas végétarien [Mitâhâra] afin d’atteindre l’état du bonheur suprême.

Celui qui aide les trois forces spirituelles à traverser la rivière qui sépare Ayodhyâ de la forêt dans sa barque s’appelle Guha, qui signifie secret.  Par ceci on doit comprendre que la descente de la grâce supraconsciente vers les états inférieurs de la conscience se fait dans le plus grand secret.  Bharata (l’esprit de sacrifice et d’abnégation) et Shatroughna (la conscience morale) doivent impérativement rester en permanence à Ayodhyâ, le sommet de la conscience illuminée, jusqu’à la fin de la mission.  Bharata et Shatrughna sont les doubles mystiques de Râma et de Lakshmana.  Leur rôle est de protéger le royaume d’Ayodhyâ alors que Râma, Lakshmana et Sitâ descendent au cœur la forêt dense (Maharloka), le Anâhata Chakra, qui se situe dans la région du cœur.  Comme on le sait, le cœur de l’homme ressemble étrangement à une forêt.  La forêt est la conscience ordinaire ou normale de l’homme(de Dasharatha), où il y a les bons (Sant-sages) et les méchants (Nishâchâras- forces de la nuit).  La fonction de l’Avatâra ou de la grâce est de protéger et de préserver les forces de l’ordre et de la créativité.  Il doit par la même occasion éliminer les forces du désordre et de l’obscurité qui hantent la forêt à la recherche de sensations et de la nourriture en faisant des ravages. 

Dans la forêt, Râma élimine Doushta-Virâdha, qui essaie de s’emparer de Sîtâ.  Virâdha, qui signifie ‘Immobilisme’ littéralement, symbolise le doute et la capitulation aussi bien que la fatigue qui cherchent à affaiblir la progression de la grâce en s’attaquant à la conscience humaine[Sîtâ] ou en essayant de voler le Shakti de Râma.  Dushta Virâdha est considéré comme une entité maudite [Doushta] et figée tout comme l’immobilisme d’ailleurs.  Dans la pratique du Yoga, Virâdha est une énergie dont le yogi aura besoin afin de progresser.  Il doit apprendre à s’immobiliser dans sa posture et demeurer au-dessus des images ou idées fixes [Chitrakoûta] de l’esprit.  Il doit par dessus tout pratiquer le non (Vi) attachement (râdha).

Les Asuras [destructeur de la vie] ou Nishâcharas sont les obstacles à l’intérieur de la conscience de l’homme qui freinent l’épanouissement de la grâce vers l’intégration totale de l’être.  Ils sont les démons du subconscient et de l’inconscient, souvent rencontrés dans les cauchemars pendant le sommeil.  Ils absorbent notre énergie et nous dépouillent de notre vitalité.  C’est pourquoi dans le Râmâyana, les démons sont dépeints comme des monstres horribles, terrifiants et vampiriques, qui se nourrissent de la chair et du sang des hommes.  Plus on pénètre au fond de la personnalité, plus ça devient obscur et les ombres, les fantasmes et les impulsions sont aussi puissants qu’effrayants.  Il n’y a que par l’exil dans l’état méditatif , qui est un pèlerinage intérieur, que ces obstacles peuvent être éliminés.  Et c’est à la personnalité de prendre cettedécision soit volontairement ou à contre cœur.

Un autre nom commun de Râma est Dâsharathé, le fils de Dasharatha.  Tout au long de l’exil, Râma se présentera comme le fils de Dasharatha.  Cela signifie que Dasharatha fait partie intégrante de l’identité de Râma et ils sont désormais inséparables tout comme la grâce ou la conscience de l’Être[Je ou le sujet sans verbe ni complément] est indissociable de la personnalité d’un individu bénie.  Quand Râma est assailli par le doute et l’indécision face à Tâtakâ, c’est sans doute un aspect de Dasharatha qui prédomine tandis que quand il s’attaque fermement à Soubâhou et Mâricha c’est l’aspect de L’Être qui prédomine.  La bataille finale va être entre l’aspect de la personnalité qui est bénit par la Grâce (Dasharatharâma) et l’aspect obscur, vicieux et maudit de la personnalité (Dashamoukharâvana).

Le Râmâyana nous enseigne aussi qu’en dépit de la descente de la grâce sur une personne, si ce dernier ne réactive pas son cœur, ne développe pas une conscience élargie et universelle ou ne se met pas au service du bien collectif et, n’arrive pas à s’unir avec l’équilibre et la créativité de la nature intérieure(Sîtâ), son progrès spirituel s’arrêtera là.  A chaque étape, il y a un obstacle à dépasser.  Une fois l’obstacle est éliminé, il y aura un peu plus d’énergie à notre disposition afin d’attaquer au prochain obstacle.  Cela est illustré par le fait que l’énergie des Asouras est absorbée par Râma après leur mort.

L’étape la plus longue et difficile est la descente de la conscience spirituelle dans les états subconscients et inconscients.  Dans le Râmâyana, nos héros mettent plus de dix ans pour arriver à Panchavati.  Mais pendant ces dix années,  s’est développée une profonde intimité entre Râma et Sîta ou entre l’Être et la réceptivité créatrice [le Je et le Moi pur].  Ce sont là les plus beaux et intenses moments de la méditation

La Bhagavad Gîtâ nous rassure qu’une personne qui a reçu la grâce ne disparaît pas à tout jamais dans la cave de l’oubli avant d'être recyclé dans la création.  Le Yogi aura une autre ou plusieurs autres chances de s’épanouir.  En effet, le rayon de L’Être, qui est descendu dans la personnalité d’un yogi, y est en quelque sorte temporairement emprisonné.  Nul doute qu’il cherchera à se libérer et à s’unir avec sa Source, L'Âme Suprême.  C’est une démarche qu’on voit très souvent chez les yogis qui, dès un très jeune âge, abandonnent leurs familles et s’adonnent à des pratiques spirituelles en vue d’atteindre la libération.  Cette explication nous donne brièvement une idée sur la théorie de la réincarnation sélective ou restreinte.

A ce propos, le Râmâyana nous informe que dans une précédente vie, Dasharatha était le procréateur Kashyapa, qui signifie la tortue.  Kashyapa et sa femme Aditi avaient pratiqué de longues années d’austérité durant le Krita Yuga [la première époque de l’évolution spirituelle] afin de faire descendre la grâce de Dieu chez eux.  Finalement, grâce à leur tapasyâ [transformation spirituelle], ils obtinrent une vision de Dieu [Vishnou, Paramâtmâ] qui leur fit la promesse de s’incarner comme leurs fils[Râmâvatâra] dans leur prochaine vie comme Dasharatha et Kaushalyâ.  Comme on l’a déjà fait remarquer, Kashyapa signifie la tortue, qui détient cette extraordinaire capacité de retracter ses organes à l’intérieur de sa carapace[Pratyâhâra].  Sa femme Aditi est sa force, sa shaktî. Aditi signifie sans deux ou sans dualité, une seule et unique pensée, la concentration de la pensée sur un seul objectif [Dhâranâ].  Selon les Pourânas, avant de s'incarner en Râma, le Seigneur Vishnou s'incarna en Vâmana et en Prashnigarbha.  Vâmana signifie une personne qui a spirituellement l'apparence d'un nain mais qui potentiellement détient la capacité de transcender les trois mondes [Trivikrama]. Prashnigarbha veut dire " celui qui pose des questions[prashni] même quand il était dans l'utérus [garbha]".  Cela nous indique que c'est une âme spirituellement éveillée qui cherche des réponses en s'interrogeant.  Et ces réponses, il l'aura quand il s'incarnera comme Shri Râmachandra, fils de Dasharatha.  Après avoir réaliser la vérité absolue, il viendra à nouveau comme le Purnâvatâra [Incarnation Parfaite] Shri Krishna au Dvâpara Youga, la troisième époque de l'évolution spirituelle.  

Dans la pratique du Yogâ, ces capacités de Pratyâhâra et Dhâranâ sont atteintes par une personne qui a su et pu maîtriser ses sens avant de pénétrer l’état méditatif [Dhyâna].  Puisqu’il n’a pas encore atteint le but du Yogâ, qui est même au-delà du Samâdhi, il doit obligatoirement se réincarner afin de terminer le travail spirituel qu’il a commencé.  La preuve que Dasharatha n’a pas encore atteint le bonheur suprême est illustré par ses trois femmes ou états d’esprit qui symbolisent l’emprise des trois Gounas[forces] de la matière sur lui.  Cette grâce qu’il avait reçue jadis s’est donc réactivée par l’intermédiaire du Poutra Kâmeshti Yagnya au moment opportun.

Au cœur de la forêt, les trois héros font la rencontre de Jatâyou, l’aigle qui symbolise la dignité, qui vole toujours très haut dans le ciel et qui voit de très loin.  Jatâyu est aussi la faculté élévatrice qui représente la prévoyance au niveau du conscient.  Il fait la promesse de toujours veiller sur Sîtâ- Dharmo rakshati rakshitah: la vertu protège ceux qui la protègent.

ETAPE 4

C’est l’étape cruciale de la mission où Shûrpanakhâ, la sœur de Râvana, fait son apparition au cœur de la dense forêt.  Mais avant que Shûrpanakhâ n’apparaisse, il y a l’épisode du corbeau qui becquette Sîtâ à la poitrine.  Râma réagit instantanément.  Il contre-attaque le corbeau qui, ne trouvant personne pour le sauver, cherche finalement refuge auprès de Râma.  Cet incident nous démontre l’importance qu’on doit attacher à la protection de la pure conscience humaine [Sîtâ], qui est très vulnérable.  Toute attaque dirigée contre elle, même bénigne d’apparence , doit être immédiatement réprimée avec fermeté.  Le corbeau représente un aspect de l’esprit inférieur [le fils de Indra].

Revenons à présent à Shûrpanakhâ.  Elle représente la Tentation Sensuelle, l'Impudence et la Vulgarité, le premier aspect explorateur (Vikshepa shakti) et sensuel[Kâmashakti] de Râvana.  Elle vient dans la forêt de Panchavati, des cinq sens, à la recherche du plaisir sensuel.  Cette tentation sexuelle est aussi appelée Urvashi et Menakâ dans les Pouranas.  Leur fonction consiste à mettre à l’épreuve la force spirituelle[tapas] des yogis.  Par ailleurs, l’image de Shûrpanakhâ illustre le fait que chez une personne mondaine et narcissique, la sensualité et la vulgarité sont assez prononcées.  Elle est toute l’opposée de la pudique et pieuse Sîtâ.  Shûrpanakhâ possède l’habilité de se déguiser en assumant de belles formes qui servent à dissimuler sa laideur naturelle.  Quand elle échoue à captiver Râma avec ses faux éclats et charmes, elle essaie en vain de séduire Lakshmana (la vigilance spirituelle).  Humiliée et enragée par son échec, elle rend Sîtâ, la pure conscience humaine, responsable de sa défaite et tente de l’agresser.  Voilà donc un autre démon qui essaie de dépouiller Râma de son Shakti, puisque c’est la pureté de l’esprit qui rend la conscience spirituelle éveillée  insensible aux avances de la tentation et à l’exhibitionnisme.  Mais avant que Shûrpanakhâ ne réussisse à s’attaquer à Sîtâ, Lakshmana intervient promptement et mutile l’orgueil ou la fierté(le nez) de Shûrpanakhâ.

Après la répression de la tentation et de la grossièreté, c’est la contre-attaque des forces de la frustration et de la colère (Khara et Dushana) qui sont là pour soutenir et protéger Shoûrpanakhâ.  Râma demande à Lakshmana de cacher Sîtâ dans une cave inaccessible et de bien la garder. L’armée dirigée par Khara et Dushana n’arrive pas à vaincre Râma.  Ils laissent leur peau sur le champs de bataille.  Prise de panique et blessée dans son orgueil, Shoûrpanakhâ se précipite chez Râvana pour l’informer de la situation de crise.  Cet fameuse épisode de Shoûrpanakhâ et de la réaction brutale de Khara et Dushana présente une grande similarité avec la tentation du Bouddha par Mara et la bataille livrée par Siddhârtha Bouddha contre l’armée de Mara.

Râvana est le roi de Lankâ, la cité aux éclats illusoires, qui fut créée par Mâyâsura (Illusion). Ce dernier donna sa fille, Mandodari, en mariage à Râvana.  Mandodari, la force ou la shaktî de Râvana, symbolise le réservoir des pensées, des instincts et des expériences mondaines du passé qui sont nées de l’illusion.  De l’union de Râvana et de Mandodari est né Indrajît, la vanité, l’arrogance, l’irrévérence et l’obstination (les traits de Rajoguna).  Râvana a aussi deux frères - Koumbhakarna (la gourmandise, l’insouciance et la léthargie: Tamoguna) et Vibhishana (le raisonnement, la sensibilité et l’introspection: Sattvaguna).

La cité de Lankâ, qui correspond au Svâdhishthâna Chakra (l’habitat du moi inférieur) et qui se situe dans la région génitale sur le plan physique, est prédominée par les forces obscures (Râkshasas), le matérialisme, les vices, le plaisir des sens, les sensations, la folie des grandeurs, le narcissisme, l'irrévérence, l’exhibitionnisme, et la vulgarité.  Il n’y a aucune place pour la vertu et la justice.  Pour bien illustrer cette prédominance du concret dans la cité, on voit Râvana s’engager dans des pratiques tamassiques, symbolisées par l’adoration de Shiva, le Dieu du Tamas ou du concret, dans sa forme génitale(Lingam) ou du plaisir sensuel.  Dans les Purânas, c’est assez courant de voir les Asouras, forces de l’anarchie, adorer Brahmâ ou Shiva.  L’adoration de Brahmâ ou l’adoration Rajassique est entreprise afin de dominer le monde tandis que l’adoration de Shiva ou l’adoration tamassique est effectuée pour semer la destruction et l’anarchie.

Lankâ est l’inconscient de Dasharatha, qui est aussi constitué des trois Gunas.  Râvana représente le Rajas, le Vikshepa Shakti, qui cherche toujours à se projeter en avant ou à s’étendre.  Kumbhakarna est prédominé par le Tamas, le Avârana Shakti, qui se laisse couvrir et s'engouffrer dans l’illusoire alors que Vibhishana symbolise le Sattva Shakti, qui s’efforce constamment à s’élever vers la lumière et le réel.

Les récits de la beauté unique de Sîtâ, qui a fait la gloire de Janaka et Râma successivement, fascinent Râvana et il décide de posséder Sîtâ, la pure conscience humaine afin de redorer sa propre gloire.  Après que la tentation sexuelle ait échoué, l’ego ou l’instinct de survie et de l’expansion personnelle [Râvana] essaie d’affaiblir la force spirituelle du yogi en ayant recours au mirage.  Il envoie son allié Mâricha (la pensée illusoire, l’appât) au cœur de la forêt afin de captiver et de détourner l’attention de Sîtâ.  Pour arriver à sa fin, Mâricha assume la forme d’un cerf en or (une chimère) et Sîtâ tombe momentanément dans le piège.  Aussitôt que l’attention de Sîtâ est captivée par l’illusion de la beauté externe, elle se détourne de Râma.  Râma est contraint de s’éloigner pour chasser l’illusion.  Mais avant de partir, il ordonne à Lakshmana de bien veiller sur Sîtâ et de ne la laisser seule sous aucun prétexte.  Cette protection de Sîtâ ou de la conscience pure est si importante qu’il apparaisse presque comme une obsession chez Râma.

Il est utile de souligner que Sîtâ ou la réceptivité créatrice est convoitée aussi bien par Râma que par Râvana.  Râma a besoin de Sîtâ afin d’accomplir la mission de libérer la conscience[moksha pradâyaka] et de bâtir un monde meilleur[râma râjya sthâpana] tandis que Râvana convoite Sîtâ dans le seul but de satisfaire ses désirs égoïstes et d’agrandir sa propre gloire et vanité.

Dans sa confusion et son agitation, Sîtâ fait la sourde oreille aux sages conseils de la vigilance spirituelle (Lakshmana) et se laisse attirer au-delà des limites prescrites par la vigilance (les restrictions spirituelles ou Lakshmana-rekhâ).  L'emprise de la chimère est tellement forte que même Lakshmana est contraint à s'éloigner.

Malgré le Lakshmana-rekhâ, Râvana réussit à capturer l’innocente Sîtâ par son manque de prévoyance.  La conscience ou l’esprit humain, qu’il soit mondain ou spirituel, est toujours vulnérable face à la tentation et à l’illusion surtout pendant les moments quand il n’est pas ancré dans l‘Être.  Une fois que l’esprit est tombé sous l’emprise de l’ignorance et des forces de l’obscurité (Nishâchara) par sa manque de prévoyance, c’est la mort assurée de la dignité(l’Aigle Jatâyou, l’ami de Dasharatha, le caractère noble et courageux).  Râvana emprisonne Sîtâ dans le Ashokavana [Anandamaya Kosha- la joyeuse cellule de l'inconscient, le plan causatif ], le jardin artificiel du plaisir éphémère, qui se situe dans les profondeurs de Lankâ.  Ashokavana signifie littéralement: la forêt sans souffrance mais la vraie signification est  l'ignorance d'apparence joyeuse.

Le Védânta explique qu’il y a cinq Koshas qui enveloppent et emprisonne l’Être.  Ces cinq accessoires de l’expérience sont: Annamaya[le corps qui dépend de la nourriture et de l'activité], Prânamaya [l’air et l’impulsivité], Manomaya [l’esprit et le désir], Vignyânamaya [l’intellect et la rationalité]  et Anandamaya [le potentiel psychique et la limite imposée à l'épanouissement].  Si vous vous référez au chapitre 1 où l’on a parlé des six facettes de L’Être, vous allez comprendre que Râma est Brahmamaya Atman [l’âme suprême au fond du Supracausatif], Sîtâ est Anandamaya [le potentiel, la Cause(Kârana) et la destinée], Lakshmana est Vignyânamaya [la décision, le choix], Hanoumân est Manomaya [le désir, le médium, l’allié indispensable], Shatrughna est Prânamaya [la vitalité] tandis que Bharata est le Annamaya [la base, l'énergie, le fondement].

Pour les mystiques, le Ashokavana correspond au Mulâdhâra Chakra, où tout le potentiel psychique et spirituel de l’humain(Koundalini Shakti) est emprisonné.  Mais à cause de son grand amour pour Râma, Sîtâ se ressaisit très vite et résiste aux avances et aux assauts de Râvana, qui ne réussit pas à la corrompre ni même à la toucher.  Comment l’ego peut-il toucher à une énergie aussi pure et innocente qui est si profondément ancrée dans la lumière divine?

Selon une légende, Râvana a eu la malédiction jadis qu’il trouverait sa mort par l’intermédiaire d’une femme pure et vertueuse.  Les mystiques savent que l’ego ne peut être détruit que par l’intermédiaire de Koundalini Shakti.  Et c’était la raison pour laquelle Râvana avait essayé naguère d’étouffer Sîtâ, qui avait alors pris la forme d’une fleur, en l’enterrant loin de son royaume.  Cette légende illustre la répression de Kundalini Shakti -qui s’est manifesté comme une fleur de lotus dans le corps astral- au fond du plan causatif.

Pour mieux comprendre l’enlèvement de Sîtâ, il faut se référer au Râmcharit Mânas de Goswâmi Toulsidâs.  Il explique que l’enlèvement de Sîtâ a été planifié par Râma et qu’en réalité Râvana n’a enlevé qu’une Mâyâ-Sîtâ, une forme inférieure de la conscience humaine qui ne procure que la gloire illusoire mais surtout beaucoup de problèmes[mâyâ].  Au fait, les problèmes de Râvana ne font que commencer avec l’enlèvement de Sîtâ.  Ainsi, l’enlèvement de Sîtâ ou la répression du Koundalini au Moûlâdhâra ne fait que suivre le plan de la Volonté Divine [Râma].  Le potentiel intégral (Sîtâ) d’un individu, qui est un rayon de l’âme (Atmârâma), était actif avant la manifestation du moi inférieur ou de l’ego; mais une fois que l’ego vient à l’avant plan, il y a un blocage du potentiel (Koundalinî) dont une grande partie est emprisonnée dans l’inconscient à cause de l’activité constringente de l’ego.  Et c’est la mission de Râma d’aller délivrer le grand potentiel résiduel(shesha) qui est emprisonné au fond de l’inconscient.


ETAPE 5

L’enlèvement de Sîtâ fait de Râvana le principal adversaire de Râma.  Affaiblit par la descente aux niveaux inférieurs et par l’enlèvement de la force dont il aura besoin pour se revitaliser, Râma laisse temporairement la première place à Lakshmana, la vigilance.  C’est précisément durant cette période sombre, alors qu’ils pénètrent un peu plus profondément dans la forêt noire, qu‘ils sont attaqués par Kabandha (emprisonnement).  Kabandha signifie le désespoir, une énergie ou une entité maudite.  Le désespoir est la pire malédiction qui puisse frapper un yogi (surtout en état de fébrilité).  Il contraint le yogi à se figer comme un arbre, à se végéter, avant de l’exterminer et de le dévorer.  Heureusement, Râma réussit à s’échapper des griffes de Kabandha et arrive à l'exterminer.  Mais avant de mourir le Kabandha libéré donne un indice essentiel à Râma pour faire progresser la recherche de Sîtâ et fait rejaillir l’espoir de la retrouver.

Ensuite, Râma fait la rencontre de Shabari, une vieille dévot sincère mais illettrée de Vishnou, la force de préservation et de la pureté.  Elle est dépeinte comme rustique et illettrée pour nous bien faire comprendre que la connaissance livresque et académique n'est pas une condition sine qua non pour se rapprocher de L'Être Suprême.  Shabari représente tout simplement la patience et la ferme résolution.  Elle a attendu l’arrivée de Râma sans jamais se résigner.  Elle choisit scrupuleusement les fruits les plus doux et savoureux pour les offrir à Râma.  Après avoir rencontré Râma, elle s’immole par le feu mystique et est absorbée en  Râma.  C’est une indication que la patience et la ferme résolution vers la réalisation de l’idéal ne quitteront plus jamais DasharathaRâma, le yogi.

Cet épisode  de Shabari nous donne la confirmation que les fruits de la patience et de la ferme résolution sont toujours doux et savoureux.  De plus, elle démontre que La Grâce (ou le regard du yogi) ne fait aucune différence de caste, de classe ou de couleur; elle est comme le soleil qui dispense ses rayons indistinctement.

 

ETAPE 6

Râma et Lakshmana entrent dans la région de Kishkinda, le subconscient de Dasharatha.  Kishkinda est le monde des Vânaras, les singes qui représentent les pensées ou impulsions turbulentes et frivoles.  Ordinairement, les grimaces, les bêtises et les soubresauts de la pensée ressemblent étrangement aux singes, les entités sub-humaines.  Les Vânaras sont en quelque sorte les forces vitales qui découlent de notre nature animale.  Ces forces sont généralement représentées par les animaux qui viennent à notre aide pendant les épisodes noires de notre existence.  Ces êtres salutaires apparaissent souvent dans nos rêves en assumant des formes animales.  Sur le plan mystique, Kishkinda correspond au Manipoura Chakra, qui se situe dans la région de nombril [Nâbhi].  Le Nâbhi Chakra est la source et le centre des 72,000 nâdis[Vânaras], qui sont les véhicules d’énergie vitale et spirituelle.

Manipura signifie la cité du joyau ou la cité éclairée car c’est ici que Râma va recevoir la première lueur de lumière ou d’espoir.  C’est aussi là que Râma fait la rencontre de Hanumân, la foi inébranlable et le dévouement exclusif, qui va lui procurer l’énergie qui lui manquait.  Hanumân est un autre aspect de Râma, comme déjà expliqué.  C’est au Manipoura Chakra que le yogi recevra la vision du Nîlamani, la perle bleue, qui accroîtra sa foi et sa concentration.  Chez un yogi de tempérament intellectuel, la vision de la perle bleue se téléportera au niveau du troisième oeil.

A Kishkinda, il y a deux clans opposés (les paires opposées ou la dualité de la pensée et des impulsions).  Un clan est dirigé par Sugriva  [celui qui a une bonne tête ou celui qui a sa tête sur ses épaules], qui symbolise le discernement et la concentration.  Il est inspiré par la pensée ou l’impulsion bien orientée et éclairée [Jâmbavân] tandis que l’autre faction est menée par Vâli, un allié de Râvana.  Vâli signifie le vice, l’entêtement de la pensée et la passion débordante.  Il avait eu la bénédiction de Brahmâ/Vidhi [du destin] qu’il peut absorber la moitié de la force de son adversaire direct pendant un combat.  N’est ce pas le cas de tous les vices tels que la drogue, l’alcool qui affaiblissent ceux qui sont sous leur emprise.  C’est pour cela qu’il est resté invaincu.  Vâli est la pensée irresponsable et vile qui ne suit que ses impulsions et ses caprices.  Il a une aversion pour tout ce qui est bien ordonné, bien orienté et bien inspiré.  Il aime l’anarchie et sème l’anarchie un peu comme le Kâmique Sharira (le corps astral bestial du désir) des Théosophiques.

Expulsés par Vâli, Sougriva et ses sujets se sont réfugiés dans une cave de la montagne de la bonne inspiration ou de la sagesse [Rishimukha] où il est interdit à Vâli de s’aventurer au risque de perdre sa vie.  Soit dit en passant, le nombril ressemble aussi quelque peu à une cave.  Est-ce une coïncidence que Sugriva, qui est le fils spirituel du soleil, habite au Manipura Chakra qui correspond au plexus solaire.  Il faut aussi remarquer qu’à Kishkinda également il y a la prédominance des trois Gunas.  Jâmbavân est l’impulsion pure (Sattvique), Sougriva est l’impulsion dynamique (Rajassique) tandis que Vâli est l’impulsion impure et destructrice (Tamasique).  Hanumân (la foi) est associé avec Sougrivâ et Jâmbavân parce que la foi est une impulsion dynamique et pure.

C’est Hanumân (la foi inébranlable) qui vient aider Râma à traverser la rivière Pampa qui sépare Panchavati de Kishkinda tout comme c’était Guha qui l’avait aidé à traverser la rivière Gangâ qui sépare Ayodhyâ de la forêt de Dandaka.  Râma entame une alliance avec Sugriva (le discernement et le dynamisme) et élimine Vâli en restant hors de sa vue.  Le vice ou la passion aveugle, qui est tout le contraire de la beauté et de la vertu, ne peut jamais voir Râma car sa vision est complètement corrompue par le mal et l’ignorance.  Après l’élimination de Vâli, Râma place Sugriva à la tête des Vânaras et nomme Angada (la force de la contemplation, la passion bien orientée, la discipline), le fils de Târâ[l'étoile] et de Vâli, le prince héritier de Kishkinda.

Après qu’il soit installé sur le trône de Kishkinda, Sugriva est temporairement distrait par les plaisirs royaux et oublie sa promesse et son engagement envers Râma.  C’est Lakshmana qui le réveille et finalement il se ressaisit.  Cet incident nous met en garde contre les distractions au niveau du subconscient.  L’exercice de la concentration, le dynamisme, l'enthousiasme ne peuvent jamais être considérés comme automatique, ils doivent être constamment surveillés et maintenus dans un état d’éveil.  Réveillé de sa torpeur, Sugriva envoie ses troupes à la recherche de Sîtâ.

Suite à son association avec Râma, Hanumân subit de profondes transformations qui le rendent très versatile, habile, intelligent et puissant.  Arrivée au bord de l’océan, l’équipe de Hanoumân se trouve devant un obstacle à première vue infranchissable.  Hanumân, qui n’est pas encore conscient de sa force extraordinaire, est momentanément désespéré.  Mais heureusement, Jâmbavân et Sampâti viennent à son secours.  Avant d’acquérir toute sa force, il est inspiré par Jâmbavân [la témérité et l'inspiration spirituelles] et par l’aigle Sampâti.  Sampâti représente la faculté élévatrice au niveau du subconscient qui, activée par la foi, développe la capacité de la clairvoyance.  Sa rencontre avec la foi [Hanumân] le rajeunit et le revitalise miraculeusement.  Cette transformation est illustrée par le fait que Sampâti réussit à localiser Sîtâ de là où il se trouve et par sa soudaine métamorphose après avoir collaboré avec Hanumân.  Dorénavant la foi sera pourvue de la témérité, de l'inspiration aussi bien que de la clairvoyance.  Seule une foi intense et sincère peut daigner traverser l’océan de l’ignorance et de l'inconscience et offrir le réconfort à Sîtâ.

La traversée de l’océan symbolise le saut mystique de Prâna Shakti du chakra Manipura au Mûlâdhâra.  La foi possède cette extraordinaire capacité de réveiller et de ranimer le potentiel réprimé qui était obligé de se replier sur lui-même.  La progression de Hanoumân vers Lankâ est si puissante et fulgurante qu’il élimine tous les obstacles entre lui et Sîtâ.  En pénétrant au Ashokavana, Hanoumân voit Sîtâ en pleurs et en douleur.  Cela nous donne une indication de l'expérience de la douleur physique au niveau de la base de la colonne vertébrale que le yogi fait quand sa conscience pénètre le Mûlâdhâra, la source et la base.  Sa présence à Lankâ, l’inconscient, le centre de l’obscurité et de l’ego impulsif et insoumis, sème le feu de la terreur et de la panique.  Mystiquement parlant, quand la force de la foi a ranimé par le feu mystique le potentiel spirituel au Mûlâdhâra, il s’ensuit une sensation de brûlure intense au niveau inférieur de la colonne vertébrale (caudal-queue).  C’est une indication de la fin inévitable de Râvana.  La bague qui contient un joyau (Mani) que Hanumân transporte jusqu’à Sîtâ retrace le mouvement du Prâna de Manipura vers le Mûlâdhâra tandis que l’épingle de la tête de Sîtâ qu’il rapporte à Râma marque la montée de Shakti comme une épine du Mûlâdhâra au Manipura.

Au Ashokavana, Sîtâ est constamment en compagnie de Trijatâ, qui veille sur sa sécurité.  Littéralement parlant, Trijatâ signifie ‘Trois Tresses de cheveux’.  Mais au sens mystique, elle représente les trois ruisseaux ou canaux  par lesquels traverse Prâna Shakti.  Comme les tresses de cheveux, les canaux prâniques (Nâdis) sont entremêlés et commencent à l’arrière de la tête [medulla oblongata] pour se terminer au niveau de la base de la colonne vertébrale où se trouve la Kundalini Shakti.  La Kundalini Shakti est généralement représentée comme un serpent qui se replie sur lui-même en trois tours et demi(Trijatâ) avec sa queue dans sa bouche.  Le ruisseau central s’appelle Soushoumnâ, la route du feu mystique alors que les deux ruisseaux qui croisent le Sushumnâ sont le Idâ, la route de la lune, et Pingalâ, la route du soleil.  L’effet du soleil est clairement illustré par le caractère éclatant et brûlant de Râvana tandis que le tempérament léthargique et effacé de Kumbhakarna  reflète l’impact de la lune.  Il faudra attendre l’épreuve du feu [Agniparikshâ] pour que Sîtâ puisse s’unir avec Râma, sa source.

C’est Trijatâ qui fait le rêve prémonitoire de la destruction de Râvana et de la  libération de Sîtâ après que Hanumân ait pénétré la cité de Lankâ à la recherche de Sîtâ.  C’est ce rêve prémonitoire qui donne le premier brin d’espoir à Sîtâ.  Cet incident nous donne une indication que le yogi, arrivé à ce stade, peut transcender les limites du temps et acquérir la connaissance de l’avenir.

Sous le commandement de Sugriva, la force de la concentration, une armée unifiée est formée.  Alors qu’ils sont arrivés au bord de l’océan qui sépare Kishkinda (Subconscient) de Lankâ (Inconscient), Râma s’engage dans une autre alliance stratégique, cette fois, avec Vibhishana, le doux frère de Râvana, qui représente l’aspect rationnel et sensible de l’ego.  C’est Vibhishana qui conseille à Râma de s’engager dans un Yagnya afin de pouvoir traverser l’océan.  Le Yajna consiste à pacifier les vagues de l’océan par le silence intérieur [chittâ vritti nirodhah- flotter au dessus des perturbations de l‘esprit].  Une fois que l’océan est pacifié, l’armée, qui a épousé la cause de Râma, se met au travail de bâtir un pont entre Kishkinda et Lankâ.  Ce pont est le lien manquant entre le subconscient et l’inconscient. C’est ce qu’on appelle l’attention spirituelle dirigée dans le Soushoumnâ Nâdi.  Le Hatha Yoga Pradipaka explique que si le yogi, assis dans sa posture yoguique, dirige son souffle après une inspiration complète et profonde dans le canal du Sushumnâ, il n’y a aucun doute que la libération spirituelle est assurée.

Les rochers portant le nom de Râma qui flottent sur l’océan représentent la conscience de la divinité (So’ham ou Râma-nâma mantra).  Les jumeaux Vânaras qui ont la tâche de faire flotter les rochers sont Nîla[So] et Nala[ham], qui représentent l’inspiration et l’expiration de Prânashakti.  Pendant les exercices de Prânâyâma, il y a toujours cette sensation de flotter dans les airs et d’être au-dessus des perturbations de l’esprit, qui sont symbolisées par les vagues de l’océan, les pensées subconscientes.  Soham signifie Je suis Cela.  Les jumeaux représentent également l’espace (Nala) bleu (Nîla) qui apparaît pendant le silence prolongé de l’esprit dans lequel tout flotte et reste à la surface de la conscience.

Il est intéressant de noter que Vibhishana est arrivé chez Râma en voyageant [chari] à travers l’espace [kha].  Pour le yogi, c’est la pratique du Khechari Mudrâ.  Dans ce contexte, le Hatha Yoga Pradipaka nous instruit qu’il n’y a pas de posture égale à la posture yoguique [Siddhâsana], pas d’exercice respiratoire comparable à la suspension totale du souffle [Kevala Kumbhaka], pas de pratique spirituelle égale au Khechari Moudrâ et qu’il n’y a rien qui puisse absorber la conscience aussi complètement que la vibration intérieure [Nâda, Aum, Pranava].

Finalement, après un long travail acharné, l’armée de la libération débarque à Lankâ, dans le territoire de l’inconscient causal.  Après avoir réuni toutes les forces positives sous son commandement, Râma dépêche Angada chez Râvana pour une ultime tentative de restituer Sitâ pacifiquement.  Mais Râvana refuse toute négociation et tente d’humilier Angada.  La force d’Angada, la contemplation et la discipline, est si puissante que Râvana ne réussit même pas à le déplacer et il subit une terrible humiliation face au serviteur de Râma.  A Lankâ, Râma s’engage dans l’adoration de Shiva, le Dieu de la destruction, avant de lancer l’attaque qui causera la destruction des forces obscures de la conscience.  Cela indique que le processus de la destruction des agents du mal de l’inconscient va commencer.  l installe ici le Râmeshvara Lingam, le symbole (lingam) de la suprématie (ishvara) de l’Être (Râma).

ETAPE 7

C’est la grande guerre, et Râma commence à éliminer les forces de l’ignorance et du mal.  Après une lutte acharnée, il met fin à l’existence de Kumbhakarna- la léthargie spirituelle, l’indifférence et la recherche des plaisirs des sens.  Dans la pratique du Yoga, Kumbhakarna est une étape spirituelle avancée.  Comme son nom l’indique, Kumbhakarna signifie l’oreille [karna] bouchée [kumbha].  En plongeant profondément dans la méditation, le yogi fait l’expérience de l’absorption intérieure profonde où il entend la vibration incréée [Anâhata Shabdha] intérieure comme le son[Nâda] du tonnerre [Megha].  Et ce son du tonnerre [Meghanâda] possède la capacité d’absorber complètement la conscience du yogi.  Le Meghanâda est aussi appelé le Pranava [l’ascension de la conscience avant(pra) d'atteindre le nouvel(nava) état suprême de conscience].  A travers le Meghanâda, le yogi arrive à dominer[Jît] l’esprit inférieur[Indra].  Il existe des pratiques dans le Yoga qui aident le yogi à se préparer afin d’atteindre l’état de Koumbhakarna et de Meghanâda, qui absorbera sa conscience dans le Vide.  Ces pratiques sont: Karno-pidhâya et Shavâsana.

Pendant la guerre, Râma, Lakshmana et une bonne partie de l’armée sont gravement atteints par les assauts venimeux de Indrajit[fils de Râvana] qui les rendent inconscients.  Les missiles de serpents venimeux représentent la force nocive qui contraint la conscience à régresser et à ramper sur le plan matériel.   Grâce à la prouesse de Hanumân (foi) qui invoque Garouda, L’Aigle de Vishnou, qui représente la supraconscience illuminé, ils sont réveillés à temps.  Garuda, l’aigle qui vole dans la région céleste, est le véhicule de Vishnou. Des battements des ailes de Garuda émanent les versets védiques ou les Mâhâvâkyas.  Les Mâhâvâkyas proclament l’unité de l’âme et de Dieu.  Il n’y a que la supraconscience illuminée qui peut porter ou soutenir le poids de l’Être Infini (Vishnou) et maîtriser les attaques de l’inconscient. Tout comme le Paon de Kârtikeya, Garouda symbolise aussi la vanité spirituelle- Aham Brahmâsmi: Je ne fais qu’un avec Dieu[An al haq en arabe].  Cette fierté (Garva) est notre véritable héritage spirituel.  Elle peut nous sauver des assauts des serpents de l’ignorance et nous élever vers les sommets de la divinité (Uda).   Il faut souligner que c’est le troisième aigle qui vient à l’aide de la Grâce dans sa quête de récupérer Sîtâ.

Plus tard, c’est Lakshmana qui est encore une fois atteint par un missile magique de Indrajît, qui momentanément arrive à rendre l’état d’éveil spirituel inconscient.  Mais il ne réussit cependant pas à le déraciner.  La lourde tâche (la montagne) de ranimer (sanjivani) la vigilance spirituelle (Lakshmana) repose uniquement sur les épaules de la foi et du dévouement exclusif à la divinité (Hanumân).  Cet incident donne une indication sur l’expérience du Kumbha et de l’absorption de la conscience dans le Vide [Shunya].  Le Sanjivani symbolise la capacité mystique de renaître du Vide dans un nouvel état supérieur grâce à la foi.  Avec l’aide précieuse de Vibhishana [Khechari], Lakshmana finit par éliminer [ou par surpasser l’état du Vide représenté par] Indrajit.

C’est encore Hanumân qui sauve Râma et Lakshmana de l’emprise de Ahirâvana, qui les a emprisonné dans les abîmes de l’inconscient.  Ahirâvana est un autre fils ou aspect de Râvana qui habite dans les labyrinthes de Lankâ.  Ahi signifie serpent, qui représente le potentiel caché ou inutilisé de Râvana et symbolise l’inconscient collectif, le fond obscur de la personnalité.  Après la destruction de Ahirâvana, Râvana se trouve sans ressources.

Finalement avec l’aide de la rationalité et de l’introspection (Vibhishana), la faiblesse de l’ego passionnel est identifiée, et Râvana, en dépit de toutes ses astuces et de tous ses atouts, est tué.  Râma l’élimine avec l’arme divine qui s’appelle le Brahmâstra.  Brahmâstra signifie l’arme du destin car l’ego irrationnel est destiné à trouver sa mort aux mains de la Grâce Divine descendue dans la personnalité humaine;  personne d’autre ne peut le tuer même pas l'Etre Suprême.  Toute son énergie est absorbée par Râma, qui est à présent devenu omnipotent et invincible (Râmeshvara).  Le Brahmâstra représente également l’arme qui perce le Brahmâ-Granthi, qui fait obstacle à la montée de l’énergie spirituelle vers l’Être.

Il est important de souligner que pendant toutes les batailles qu’il a faites, Râma s’est toujours servi des armes mystiques qu’il avait obtenues par l’intermédiaire de Vishvamitra au Tapoloka.  La différence fondamentale qui existe entre Vashishtha et Vishvamitra est que Vashishtha est un Brahma-Rishi, un adepte qui nous instruit sur la nature de soi et de l’Etre et qui nous indique le chemin vers la divinité.  Il représente en quelque sorte les Védas.  Vishvâmitra est, quant à lui, un Kshatriya-Rishi, celui qui nous arme spirituellement avant de nous lancer dans la bataille contre les ennemis de la réalisation.  Il représente les Tantras, les guides pratiques de la spiritualité. Les deux sages sont deux forces complémentaires, parfois même concurrentes.

Il est très intéressant de considérer la façon par laquelle Vibhishana a aidé Râma à neutraliser Râvana, le soleil noir de l’inconscient, le virus psychique.  Le Hatha Yoga Pradipaka nous instruit que le corps vieillit à cause de l’effet du soleil mystique qui se situe au niveau du nombril.  Il consomme et détruit tout le nectar divin [amritam] qui est généré par la lune mystique[Soma] qui se trouve au niveau du palais au dessus de la langue.  Dans la bataille, on voit Râvana résistant assez aisément aux flèches lancées par Râmachandra.

Mais grâce à l’aide de Vibhishana [Khechari Mudrâ], qui indique à Râma le Amrita-kounda dans lequel Râvana récupère tout le nectar pour son propre plaisir, Râma réussit à éliminer Râvana en détruisant le kunda.

Suite à l’élimination de Râvana, l’armée de Râma libère tous les devas (forces et facultés naturelles de l'harmonie) de leur emprisonnement.  Après avoir traversé l’épreuve du feu (Agniparikshâ), Sitâ ou Kundalini Shakti est légitimement accueillie par Râma.  Il est naturel que le Jiva (Sitâ) doit se purger des impuretés et effets néfastes de Lankâ avant de pouvoir se fusionner avec Atmâ ou Râma.  C’est la seconde communion spirituelle.  Il est intéressant de noter que la restitution de Sîtâ s'est faite par le biais du feu, qui est l’énergie spirituelle (Vahni) qui active la montée du Koundalinî Shakti dans le Soushoumnâ Nâdi, le canal central.  Ce Nâdi se trouve au centre de la colonne vertébrale au niveau du corps subtil fluidique.  Grâce à l’activation du feu mystique dans le Soushoumnâ, Râma (Shiva) et Sîtâ (Shaktî) s’unissent à nouveau.

Après la destruction de Râvana et la fusion de Sîtâ et Râma, Dasharatha refait son apparition comme par enchantement.  Il apparaît resplendissant comme un dieu et bénit Sîtâ-Râma.  Dorénavant, il n’y aura plus de Sîtâ et de Râma mais tout simplement Sîtârâma.  Il sont devenus inséparables comme le soleil et sa lumière.  Cette apparition divine de Dasharatha est une confirmation que Dasharatha, l’enfant de Manu ou le mânava, l’être humain, le fils de l'homme, la personnalité, a atteint le bonheur suprême et la libération.  Il est à présent libéré de l’emprise des trois Gunas.

Râma, qui a déjà couronné Vibhishana, l’installe comme Roi de Lankâ.  Après la réalisation complète ou la libération, il subsiste un ego ou un moi, mais ce dernier reste pur et soumis à la volonté divine(c'est Râmabhakta Vibhishana). 

La conscience divine libérée rentre à Ayodhyâ après avoir transformé toutes les couches de la conscience.  Le voyage du retour, l’ascension, se fait sur le Poushpaka Vimâna, la voiture de fleur, qui représente les Chakras.  Les Chakras sont généralement dépeints comme des fleurs de lotus par les mystiques.  On note que le voyage de retour, l’ascension vers Ayodhyâ, la supraconscience libérée, se fait très vite.  Ensuite c’est le Râmarâjya- le règne de la Beauté, de l’Harmonie et de l’Unité qui emplit toute la société et transforme le monde en un paradis terrestre.  Comme on peut le constater, Râma ne s’approprie jamais d’aucun territoire après avoir vaincu les forces de l'anarchie qui régnaient.  Il se contente de rétablir l’ordre et d'y  promouvoir la faculté la plus appropriée car sa mission est de réorganiser, de réorienter et certainement pas de détruire aveuglement.  Il est plus que clair que Râma ne peut habiter qu’à Ayodhyâ, qui est son milieu naturel [Sâketa Dhâma].

Dans le Râmâyana, Râma fait la promesse de ne prendre qu’une seule épouse: Ekapatni vratam.  Cela indique que la Grâce divine est au-delà des trois Gunas; la présence de Sîtâ à côté de Râma symbolise que la Grâce vit perpétuellement dans un état de conscience caractérisé par l’Unité sans dualité, Advaita.

ETAPE 8

Sitâ est exilée de la cité d’Ayodhyâ.  Elle est accueillie à l’ermitage du sage Vâlmiki, un admirateur et dévot de Shrî Râma.  Il avait fait beaucoup d’austérités afin de transformer sa perception et sa façon de vivre.  Auparavant, il était un grand brigand sans cœur.  Grâce à une prise de conscience et au repentir, et avec l’aide de Râma-nâma (appel à la conscience divine), le criminel Ratnâkara [créateur de joyau] a pu se réorienter et être associé au Râmâyana (le chemin qui mène à la conscience divine).

L’épisode de l’exil nous démontre tout simplement que Vâlmiki a besoin de la pure conscience et de la créativité (Jânakî Sîtâ) afin de réaliser La Divinité (Râma) et pour pouvoir propager Sa gloire et le chemin qui y mène pour le bien des aspirants du monde entier.  La naissance de Lava et Kousha à l’ermitage de Vâlmiki donne l’indication que ce dernier a eu la rare bénédiction de réaliser la conscience divine (Lava- Adhyâtmâ Râmâyana, la réalisation) aussi bien que l’inspiration pour composer l’épopée du Râmâyana sur les feuilles de palmiers (Kusha- Grantha ou Sthûla Râmâyana, le livre).  Tous deux sont les fils de Râma et de Sîtâ car le secret de la réalisation de la divinité (Lava) et l’inspiration en mots qui décrit le chemin qui mène à la réalisation divine (Kusha) sont tous deux nés de la fécondation de la pure conscience créative humaine par la conscience divine.  Et c’est la raison pour laquelle tous deux chantent constamment et éternellement la gloire de Sîtâ-Râma, la divinité en l’homme.   On sait aussi que Vâlmiki a pu s'élever spirituellement grâce à l'aide de Devarishi Nârada, qui lui avait donner la simple pratique de Râma-Nâma japa, la récitation du Nom Divin comme contemplation de L'Être Suprême.  Nârada, le sage divin [deva rishi], fils de Dieu[Brahmapoutra], signifie la vision spirituelle[deva rishi] qui donne[da] la conscience divine [Nâra].  L'Etre Suprême avec qui Nârada est toujours associé s'appelle Nârâyana, Source[âyana] de la divine conscience [nâra].  C'est grâce à cette simple pratique que le voleur sans cœur, l'esprit médiocre et égoïste,  a pu se transformer en une personne créative[kavi- le poète].  La présence de Sîtâ, qui en réalité est délibérément envoyée chez Vâlmiki par Râma à travers Lakshmana symbolise clairement que l' âme suprême intérieure[Râma] par le biais de la conscience éveillée [Lakshmana] a éveillé la Koundalini Shakti en Ratnâkara.  Grâce à sa pratique sincère et sans relâche, Ratnâkara est arrivé à un niveau de conscience très élevée ou il a perdu toute notion du corps physique.  Ceci est représenté symboliquement par la fourmilière [Valmika] qui s'est bâtie autour de son corps.  Quand une personne a une partie de son corps qui est ankylosé on dit souvent qu'il a des fourmis dans cette partie du corps.  Or dans le cas de Ratnâkara, tellement son absorption spirituelle est profonde que tout son corps est complètement ankylosé[engourdi], d'où son surnom de Vâlmiki, qui est devenu un Videha comme Janaka.   

Il existe une variation de l’histoire de la naissance de Lava et de Kusha.  Apparemment, Sîtâ avait donné naissance uniquement à Lava.  Le sage Vâlmikî, qui était vieux et presque aveugle, veillait sur Lava pendant que Sîtâ vaquait à ses occupations.  Une fois, alors qu’il veillait sur Lava, il s’endormit pendant un court instant et Sîtâ prit Lava avec elle.  A son réveil, Vâlmiki constata la disparition de l’enfant et fut saisie d'une immense panique.  Il crut que l’enfant fut enlevé et dévoré par un animal sauvage, que l'enfant sacré fut perdu à jamais.  Avec sa science yoguique, il créa un enfant à partir de l’herbe (Kousha) et l’anima.  Et c’est ainsi que Sîtâ eut deux fils- Lava et Kusha.  Cette petite histoire, en effet, nous illumine sur l’origine de Lava (la réalisation de la divinité qui est née de la fusion de Râma et de Sîtâ) et de Kousha (l’histoire inventée par Vâlmiki pendant un instant de panique et de compassion).  En effet, il craignait que la réalisation de la divinité, qu’il a eu la bénédiction de recevoir, ne se perde à tout jamais après sa mort.

Ce souci concernant l’avenir de son héritage spirituel est aussi présent chez Râma.  C’est pour cette raison qu’il organise le Ashva-medha Yagnya afin d’assurer l’avenir d’Ayodhyâ en cherchant quelqu’un qui va prendre la relève.  Le sens mystique du Ashva-medha Yagnya est le suivant : Ashva signifie cheval ou les organes de sens qui sont aussi fougueux et incontrôlables que les chevaux.  Medha signifie l’intellect qui a la capacité de diriger et de bien orienter les sens.  Donc par cette pratique, Râma veut introduire la maîtrise de soi qui conduit à la réalisation de la vérité (Yajna).  Lava et Kusha, qui sont instruits sur le Râmâyana[le chemin qui mène à la Conscience Divine] par le sage Vâlmiki, réussissent aisément à arrêter et à maîtriser le cheval.  Leur victoire sur les frères de Râma et sur Hanoumân indique qu’ils ont acquis la vigilance spirituelle, l’abnégation, la moralité et la foi.  La présence constante de Sîtâ à leur côté indique qu’ils sont imbus de la créativité spirituelle et protégé par Kundalini Shakti.  Finalement, ils arrivent même à forcer Râma à venir à eux.  Tout cela signifie que grâce au Râmâyana Kathâ [la compréhension du vrai sens du Râmâyana], quelqu’un peut se développer facilement et contraindre la Grâce Divine à descendre sur lui.  Et ainsi l’avenir spirituel, la tradition est assurée.  C’est pour cela que le Râmâyana Pârâyana et l'Abhyâsa (l’étude et l’analyse du Râmâyana) sont fortement recommandés.

ETAPE 9

C’est la fin du voyage et de la mission spirituelle.  Sîtâ, la pure conscience humaine, se fond dans la Terre, la conscience collective de la race humaine (Prithvi) au plan causatif, d’où elle fut initialement déterrée.  Cette fusion est essentielle afin de purifier la conscience collective de l’humanité et de préserver la graine de la réalisation spirituelle dans la source humaine.  Normalement, après le passage d’un Avatâra, d’un prophète ou d’une personne réalisée, la conscience collective se purifie et progresse d’un ou de plusieurs pas vers la réalisation de la divinité.  Cela est d’autant plus qu’évident si l’on observe l’impact de la vie des êtres éclairés comme Krishna, le Bouddha, le Christ, et le prophète Mahomet.  On constate qu’ils ont tous contribué significativement à changer la qualité et l’orientation de la conscience humaine dans les différentes parties de la Terre.  Même de nos jours, ils continuent à influencer nos pensées et nos façons de voir et de vivre la vie.

A la fin de sa mission, VaidehîRâma, la conscience divine libéré du corps,  plonge définitivement dans la rivière sacrée du Sârâyu [essence et éternité].  C’est le Mahâsamâdhi [l'ultime départ] dans la conscience divine, et l'Avatâra se fond dans La Vérité Suprême, Sa Source, Paramâtma, Paramdhâma, Vaikountha ou Brahmaloka ou Kailâsha, Le Royaume Suprême et Impérissable.

 

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