LA VOIE DE L'ACCOMPLISSEMENT DE TOUS LES DESIRS

Swami RAMA TIRTHA
(traduction Gaura Krishna, parue dans RAMA NAMA No 30 de mai 1996))

Conférence donnée le 13 décembre 1902 devant "La Fraternité Hermétique" U.S.A.


Mon propre Soi sous toutes ces formes,

Avant d'entamer le sujet, il sera dit quelques mots sur le retard matériel de l'Inde. Il fut un temps où l'Inde possédait probablement plus de richesses que toute l'Europe en possède de nos jours; il fut un temps où l'Inde avait plus de joyaux et de diamants, de perles et de rubis que ce que toute l'Amérique en possède aujourd'hui. L'Inde a eu son jour de prospérité matérielle. Nations après nations ont envahi l'Inde d'une époque à l'autre. La Grèce est devenue riche sur le dos de l'Inde, la Perse est devenue riche sur le dos de l'Inde, l'Afghanistan est devenu riche sur le dos de l'Inde, et aujourd'hui l'Angleterre amasse la fortune sur le dos de l'Inde. L'Inde a véritablement été un jour la terre de l'or et des diamants.

Nous ne nous repentons pas. Nous ne sommes pas désolés du retard actuel que connaît l'Inde du point de vue de la prospérité matérielle. Nous savons qu'il y a une loi, une loi divine, une loi de notre propre nature, qui dirige les affaires, qui occasionne toutes choses. La main divine qui dirige et conduit nos affaires, nous la connaissons, et la connaissant, nous ne languissons pas à cause du retard matériel. Nous ne faisons pas attention à la perte de la richesse matérielle. Ces choses, ces objets matériels de prospérité, tout cela a été essayé, les Indiens les ont mis dans la balance et ne les ont pas trouvés à la hauteur. L'Amérique est aujourd'hui très jeune, très jeune, elle n'est qu'un bébé; comme l'Europe est aussi très jeune. Elles tentent aujourd'hui ces expériences. L'Inde a tenté ces expériences au niveau matériel, elle a pesé toutes ces choses et ne les a pas trouvées à la hauteur. Les Indiens les regardent comme une simple goutte d'écume, rien d'autre. Elles ne sont pas pour vous un facteur de bonheur; elles ne peuvent vous rendre véritablement heureux, jamais, jamais. Le fer et l'or sont bons pour acheter du fer et de l'or; c'est tout. Le bonheur n'est pas du même genre que ces objets matériels, il ne peut être acheté. Le bonheur, le véritable bonheur ne peut être acheté par ces choses.

Le secret du bonheur est différent. Le secret est que plus vous recherchez les choses et plus vous les perdez. Plus vous êtes au-dessus du désir et plus vous vous sentez au-dessus du besoin et plus les objets vous recherchent. Même les Indiens d'aujourd'hui, les Indiens de sagesse profane, ne connaissent pas ce secret et par besoin d'observation assidue et profonde, ils attribuent des causes à des phénomènes qui ne sont pas les véritables causes. Pourquoi l'Inde est-elle tombée politiquement, ou, du point de vue matériel, pourquoi l'Inde est-elle si bas ? C'est parce que les Indiens d'aujourd'hui sont les Indiens de l'époque où a commencé la chute de l'Inde; ils manquent de Vedanta Pratique. Vous serrez étonnés d'entendre que la demeure du Vedanta, la demeure de la spiritualité, l'Inde, la source de l'idée d'unité, la source de l'idée que tout est un, la crique même d'où est sorti le Gange de la connaissance divine, de la connaissance spirituelle, de la vénération de soi, de la connaissance de soi, du respect de soi, que l'Inde manque de Védanta Pratique, et que cela a été la cause de sa chute. Vous serez étonnés d'entendre que ..., mais nous n'avons pas le temps de nous étendre sur ce sujet. Si le temps le permet, nous en parlerons dans une prochaine conférence. Comment les nations s'élèvent et chutent, qu'est-ce qui derrière la scène fait tomber une nation et en élève une autre, quelle lune cause le flux et le reflux des nations ? Il suffit de dire, et vous accueillerez bien ces paroles de la bouche d'un homme qui vient de l'Inde et qui a étudié l'Inde et les autres nations, qu'aucune nation ne peut tomber de quelque point de vue que ce soit sans être spirituellement dégradée. D'autres Indiens ne seront peut-être pas d'accord avec Rama sur cette affirmation, mais Rama fait cette affirmation de sa propre autorité, sur l'autorité de l'observation assidue. Mais comment se fait-il qu'aujourd'hui l'Amérique avance rapidement et fasse de merveilleux progrès ? Du point de vue du progrès matériel, pourquoi l'Amérique avance-t-elle si rapidement ? Parce qu'inconsciemment les Américains vivent le Vedanta sur le plan matériel. Comment les Américains vivent-ils le Vedanta pratiquement et pourquoi est-ce la cause de leur progrès matériel, nous n'avons pas besoin de nous étendre plus longtemps là-dessus. Bien, il en est ainsi. La vérité, la vérité, la vérité seule aura la gloire. La réalité, le caractère réel, le caractère véritable aura seul la gloire et le succès. Rien d'autre ne peut l'avoir.

Laissons de côté tous les détails, et laissons de côté tous les commentaires sur la remarque vraie et apparemment paradoxale que nous venons de faire, sur ces assertions étonnantes, laissons-les de côté pour des réflexions ultérieures et venons-en maintenant à notre sujet.

Nous lisons dans la Bible : "Demandez et vous trouverez, frappez et on vous ouvrira." Par ailleurs les Hindous prêchent la loi du Karma qui entraîne que tout désir porte en lui sa propre satisfaction, que tout désir et toute volonté font la promesse d'être comblés à un moment ou à un autre; ils doivent être comblés. Rama ne va pas faire de discours là-dessus. Y faire allusion sera suffisant pour le moment. On dit que tout bourgeon vu dans un jardin porte en lui la réalisation de sa promesse, il fleurit et s'épanouit à un moment ou à un autre; et tous les espoirs portés par les animaux inférieurs à un moment ou à un autre sont appelés à se réaliser. Aucune énergie n'est perdue en ce monde, aucune force n'est perdue, aucune matière n'est perdue, rien n'est perdu. Nous pouvons lire quelque chose sur la loi de la persistance de la force, sur la loi de la conservation de l'énergie, sur la loi de l'indestructibilité de la matière; et alors l'activité mentale, les désirs mentaux, les volitions et les volontés, cette énergie mentale, comment peut-elle être détruite ? Elle doit porter fruit, elle doit tôt ou tard être comblée. Tous les désirs doivent être ainsi comblés. Ceci est la somme et la substance de la Loi du Karma. Les Hindous prêchent que, selon cette Loi : "Demandez et vous trouverez, frappez et l'on vous ouvrira." Mais en est-il vraiment ainsi ? En est-il véritablement ainsi ? Trouvons-nous que c'est le cas dans notre vie de tous les jours ? Oui, mais si ensuite vous voulez le prouver par votre expérience de la manière dont les gens comprennent habituellement la Loi du Karma, ou si vous voulez vérifier cette affirmation de la manière dont les gens ordinaires comprennent la signification de "Demandez et vous trouverez, frappez et l'on vous ouvrira", vous vous tromperez. Vous verrez que cela ne marche pas; ce principe ne marche pas en pratique. Cette affirmation n'est pas l'entière vérité, elle n'est qu'une partie de la vérité. Les gens ordinaires négligent ou ne comprennent pas ce qui était entendu lorsque l'affirmation a été faite dans la Bible ou par les Hindous : "Frappez et l'on vous ouvrira"; mais vous aurez aussi à en payer le prix. Il y a aussi un prix à payer. N'oubliez pas que le prix est absolument nécessaire. La question du prix, nous la trouvons dans la Bible : "Qui veut garder sa vie la perdra." Qu'est-ce que cela veut dire ? Cela implique que celui qui réclamera, languira pour ou désirera quelque chose ne l'aura pas. En languissant, en réclamant et en désirant nous voulons garder notre vie. "Celui qui voudra garder sa vie la perdra."

"L'homme ne vit pas seulement de pain". Voyons. Dans la Prière du Seigneur (Notre Père) nous disons : "Donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien", "donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien", et nous disons ici que l'homme ne vit pas seulement de pain. Réconciliez ces affirmations; comprenez-les complètement. La signification de la Prière du Seigneur (Notre Père) où est affirmé : "Donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien" n'est pas que nous devons demander, le sens n'est pas que nous devons réclamer, vouloir ou désirer, pas du tout. Cà n'est pas ce que çà veut dire. Cela veut dire que même un roi, un empereur, qui n'est en aucun danger de ne pas avoir son pain quotidien, même un prince sur que son pain quotidien lui est garanti, même lui doit offrir cette prière. S'il en est ainsi, "Donne nous aujourd'hui notre pain quotidien" ne veut bien évidemment pas dire qu'ils doivent se mettre en position de mendier, qu'ils doivent demander la prospérité matérielle. Non. Cette prière signifie que tout le monde, qu'il soit prince, roi, moine ou qui que ce soit, doit regarder toutes ces choses autour de lui, toute la richesse et la plénitude matérielle, toutes les richesses, tous les objets beaux et attractifs, comme n'étant pas les siens, comme ne lui appartenant pas, comme étant à Dieu, à Dieu, "pas à moi", "pas à moi". Cela ne veut pas dire mendier, mais cela signifie renoncer. Voyez. "Donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien". Cela ne veut pas dire mendier et demander, mais cela signifie plutôt renoncer et abandonner; abandonner : renoncer vers Dieu : tel était le sens. Vous savez comme est déraisonnable pur un roi d'offrir cette prière : "Donnez-nous aujourd'hui etc.", si on le prend dans le sens ordinaire. Cà n'est vraiment pas raisonnable ! Cela devient assez raisonnable lorsque le roi, en offrant cette prière, se met lui-même dans la position où il renonce à tous les joyaux de son trésor, à toutes les richesses de sa maison, à la maison elle-même, où en quelque sorte il les abandonne, où pour ainsi dire il les rejette. Il rompt toute relation avec eux pour ainsi dire, et se il tient en-dehors d'eux. Il est le moine des moines. Il dit : "Ceci est à Dieu, cette table, tout ce qui est sur la table est Sien, pas mien; je ne possède rien. Tout ce qui vient vient de mon Unique Bien-Aimé." Il comprend de cette manière-là. Et si vous prenez le sens de "Donnez-nous ce jour etc." comme Rama vient de l'expliquer , alors vous verrez que c'est en accord avec "L'homme ne vit pas seulement de pain !" Alors vous verrez que çà s'y accorde, sinon non.

Nous trouvons encore dans la Bible : "Cherchez d'abord le Royaume des Cieux et toutes choses vous seront données en plus." C'est le secret. C'est le secret de la prière. C'est le complément que le Maître a donné au Notre-Père, l'expression :" Cherchez d'abord le Royaume des Cieux et toutes choses vous seront données en plus."

Encore : "Elle enfantera dans la douleur." Nous trouvons ici le lien manquant, le facteur manquant. Elle enfantera l'enfant, mais la douleur, la douleur est le prix. Le désir portera fruit, tout ce que vous demanderez arrivera, tout ce que vous désirez vous l'aurez, réalisé. Oh, mais vous aurez à payer le prix de la souffrance. "Elle enfantera dans la douleur." On neparle pas que de la femme, on parle de tout le monde. Le désir fructifiera, mais en payant le prix. Quel est le prix ? La souffrance ! Même si le mot souffrance demande une explication. Souffrance signifie renonciation à tous les désirs. Qui verra ses désirs satisfaits ? Qui ? Celui qui s'attache à ses désirs, celui qui vend son coeur et son âme à ses désirs ? Non, non. L'homme qui, pour ainsi dire, nourrit ses désirsde manière majestueuse, qui nourrit ses désirs avec indifférence, avec une attitude neutre, lui seul verra ses désirs fructifier.

Les gens disent qu'il est répondu à leurs prières. Qu'est-ce que des prières ? Si l'on prend le mot prière dans le sens de demander, mendier, désirer, vouloir, souhaiter (certaines personnes prennent le mot prière dans ce sens), alors, si l'on comprend le mot prière comme vouloir, souhaiter, demander, mendier, les prières sont entendues ? C'est une affirmation erronée. Si par le mot "prière" vous entendez demander, mendier, vouloir, souhaiter, désirer, alors aucune prière ne sera entendue. Priez et vous n'obtiendrez jamais. Demandez et vous ne l'aurez jamais. Mendiez et tout vous sera refusé. Mais d'habitrude on entend par le mot 'prière' quelque chose de plus élevé. Quoi ? Par le mot 'prière', nous entendons simplement : s'élever à un état où vous serez au-delà du désir, où vous serez en accord avec l'expression : "Que Ta volonté soit faite." Voyez. La prière ne signifie pas demander, mendier, vouloir, désirer et avoir sa propre volonté faite. Les gens comprennent que le mot 'prière' veut dire que leur propre volonté sera faite, mais le soi qu'ils comprennent est le petit soi, le soi qui mendie; mais l'essence, la vie entière de la prière repose dans le sentiment : "Que Ta volonté soit faite." Lorsque le corps est sujet à toutes sortes de troubles, à toutes sortes de peines et de souffrances, même alors du fond de votre coeur, du coeur de votre coeur jaillit l'idée ou s'exprime la pensée : "Que Ta volonté soit faite". C'est très bien. Quand le corps est malade, lorsque toutes les circonstances autour de vous, que tout est contre vous et que tout va contre vous, alors du dedans de vous jaillit le sentiment : "Que Ta volonté soit faite", pas la mienne. Cela est résignation, cela est refus de soi, rejet du petit soi, cela est l'essence, l'esprit, l'âme des prières, des prières du coeur. Ces prières qui ne se terminent que par des désirs égoïstes, ces prières ne sont jamais, jamais entendues. Ces prières ne sont entendues que lorsque le mental s'élève à des plans tels que le monde n'existe plus, où il y a une consécration absolue et où le corps n'existe plus, où le mental n'existent plus, où les relations sont laissées derrière, les liens tous oubliés et où votre mental se trouve dans cet état de supra-conscience pendant quelque temps, disons même pendant une seconde. Et après cela, juste en vous éveillant de cet état, 'non, juste en vous endormant après cet état', juste en redescendant de cet état, si un désir surgit devant vous, il doit être comblé. Les prières de ce genre sont entendues, lorsque l'on s'est élevé à un niveau, à une hauteur de parfait oubli du corps, de parfait oubli du petit soi, de parfait oubli du monde, de parfait oubli de tout, de parfaite résignation, de parfaite renonciation. Mais eo ne doit pas les appeler prières de mendicité, on ne doit pas les appeler 'prières de demande'.

Il y a aussi des gens qui ne prient pas de la manière habituelle, qui ne disent aucune forme de prière et leurs désirs se trouvent satisfaits, leurs désirs se trouvent comblés. A quelles conditions ? Quel genre d'hommes est-ce ? Quelle sorte de personnes ? Regardez simplement. Vous avez un désir et vous continuer à désirer, à languir, à vouloir, à souhaiter, à réclamer. Aussi longtemps que vous êtes dans cet état de mendicité, tout vous est refusé. Vous comprenez, si vous devez aller voir un grand homme, vous y allez avec des vêtements décents. Dieu est le plus Grand des grands, le plus Haut des hauts, au-delà de tous besoins, au-delà de tous manques. Si vous allez vers Lui, allez-y dans des habits décents, allez-y dans un vêtement qui soit comme Lui, qui soit digne d'un homme sur le point d'approcher un Etre au-delà du besoin. Vous devez aussi être au-delà du besoin. Vous devez aussi être au-delà de la mendicité, au-delà de l'habit du boutiquier, au-delà de l'habit du mendiant. Personne n'aime un mendiant. On refuse à un mendiant. Les gens fuient sa présence. Dans ce pays (NdT : Les Etats-Unis. N'oublions pas que Swami Rama Tirtha s'adresse à des américains et non aux indiens) on ne veut pas des mendiants ni des flâneurs, il n'y a pas d'endroit pour eux. Si vous devez approcher Dieu, allez-y en habit divin. Qu'est-ce qu'un habit divin ? Un habit qui n'a pas le goût du mendiant, qui n'a pas le goût du besoin ou du manque. Vous devez vous sentir vous-mêmes au-delà du besoin ou du manque, alors et alors seulement vous serez accueillis par Dieu.

On qu'une personne qui languit, qui veut, qui souhaite, qui se trouve dans le malheur, qui ressent le besoin, qui se trouve dans le besoin ou dans le malheur, on dit que le bonheur ne peut pas venir à elle. Aussi longtemps que vous languissez, voulez et désirez, vous êtes en état de manque, vous êtes dans un état de malheur. Alors la satisfaction d'un désir qui est le bonheur ou, disons cet objet de désir qui est à vos yeux plein de bonheur, il ne viendra pas à vous. Il y a antagonisme entre les deux. Votre soi est mendiant, dans le besoin; cet objet de désir est élevé, glorieux, plein de bonheur. Il y a alors antagonisme entre les deux. Cet objet ne viendra pas à vous. Vous serez attiré vers l'objet, vous le rechercherez, mais il vous évitera, toujours. Et lorsque vous le quittez et lui tournez le dos, après avoir été découragé quelque temps, après avoir souffert de l'échec pendant quelque temps, après n'avoir pas atteint le succès, vous quittez et perdez l'objet, vous devenez sans espoir à son sujet, vous l'abandonnez. Vous lui tournez le dos. Alors, au moment même où vous tournez le dos à l'objet, où vous l'abandonnez et le perdez, à ce moment même vous êtes au-dessus de l'objet.. A ce moment même vous vous placez à un niveau plus élevé que l'objet. Vous vous élevez au-dessus de l'objet, et cet objet vous recherchera. N'en est-il pas ainsi ? Tout le monde le sait par expérience, faites simplement appel à votre propre expérience, et dans tout désir vous avez eu cette sorte d'expérience. Lorsque vous aimez une personne, que vous languissez et avez soif d'elle, vous la voulez, oh, vous la voulez. C'est seulement lorsque vous la quittez et la perdez pour un sentiment plus élevé, un sentiment qui s'élève au-dessus de tout 'moi et toi', çà n'est qu'à ce moment que vous trouverez l'objet désiré près de vous. C'est un fait, un fait patent. Alors seulement vous aurez l'objet près de vous.

Comme cela se fait-il ? Parce que, voyez-vous, le semblable attire le semblable; le Soleil est matière, la terre est matière. Le Soleil attire la terre et toutes les planètes. La terre n'attire pas le Soleil vers elle, mais elle est attirée par le Soleil. Le Soleil attire la terre à lui. De même avec une électricité positive et négative, il y a une différence de degré et non de genre. La science le prouve. Voici un aimant, et voici un morceau de fer, le plus lourd va attirer le plus léger. C'est une loi bien connue de la science.

Il en est de même lorsque vous quittez l'objet, vous quittez et perdez l'objet et vous l'abandonnez, vous vous élevez dans un sentiment qui est un sentiment de non-manque, qui est un sentiment au-delà du besoin, au-delà du désir, sans désir, qui est un sentiment de sans-désir. Vous êtes à un niveau plus haut et vous êtes le Soleil, et à ce moment-là ce plaisir et cet objet deviennent simplement la terre ou quelque autre planète et vous l'attirez vers vous, il vient à vous.

En outre, lorsque l'objet du désir vous est apporté, vous vous sentez là encore un peu exalté, et vous vous sentez alors encore en manque, il y a encore rupture et cela se passe ainsi. Vous prenez le trône du Roi et toutes les autres personnes vous recherchent, de la même manière que tous les sujets sont attirés par le roi, tous les courtisans et les officiers; ils cherchent après le roi, ils veulent obtenir une audience, ils le réclament, même s'ils ne sont pas invités. C'est la même chose quand vous vous sentez au-dessus du désir, au-dessus du manque, au-dessus du besoin, vous gardez le trône du roi; tous ces objets, tous ces désirs vous rechjerchen,t comme des officiers ou des courtisans, ils vous recherchent, ils veulent avoir une audience avec vous, ils vous réclament. Et que se passe-t-il ? Habituellement, après être restés dans cet état que l'on ne peut décrire mais que l'on peut expérimenter, dans cet état de transcendance, les gens trouvent que les objets charmants et attirants sont attirés par eux. Quand il s'en approchent, ils ne font que quitter leur trône et descendre, ils se trouvent tourmentés par le besoin ou le manque : là encore ils se mettent à un niveau inférieur et l'objet du désir les quitte. C'est ce qui se passe. On peut l'expliquer d'une autre manière.

Dans une voiture il y a une portière, et une personne se tient à cette portière. Elle invite son ami : "Entre, entre". Lorsque l'ami arrive, du fait de la sur-anxiété, cette personne qui se tient à la portière ne la quitte pas mais y reste. Par où l'ami peut-il entrer ? Elle ne laisse pas de place à l'ami, l'ami ne peut pas venir à elle, la voiture part, et elle reste sans l'ami. C'est ainsi.

Vous avez un désir, cette volonté ou ce besoin. Le désir est très intense, très profond. En désirant, vous invitez l'objet du désir. Il vient mais dans votre anxiété vous ne quittez pas la porte, vous laissez la porte bloquée, vous ne lui laissez pas de place. Vous souffrez, vous souffrez. Vous ne faisiez que mendier et vous ne l'avez pas trouvé. Après avoir mendié, demandé, désiré, vous devez évacuer la porte, vous devez quittez cet endroit et abandonner; abandonnez, et alors l'ami entrera, abandonnez et vous trouverez l'ami à vos côtés. C'est ainsi.

Supposez que vous ayez un désir, une volonté ou un souhait, ou quelque chose du même genre. Vous continuez de désirer, l'objet est attiré vers vous, mais vous ne l'aurez jamais à moins que vous ne vous éleviez au-dessus du désir et entriez au-dedans de vous, comme l'homme doit entrer dans la voiture vous devez de même entrer en vous, dans le Soi réel. Ainsi vous recevre ou non l'objet selon que vous évacuerez la position ou que vous la laisserez bloquée.

L'air dans cet endroit est chauffé par le soleil et il s'élève; et l'air qui vient des alentours s'engouffre pour remplir la place vide. Si l'air reste à sa place, l'air de l'extérieur ne peut venir prendre sa place.

Tout aussi longtemps que vous gardez les désirs et le petit soi, ainsi que l'état de vouloir et de souhaiter, les objets du désir ne se précipitent pas vers vous. Quittez ces désirs. Demandez d'abord, vous pouvez même mendier mais ce n'est pas assez. Vous devez après cela vous élever au-dessus de la mendicité et du fait de désirer, vous devez rompre avec ces désirs et aller au-delà d'eux, et ils seront alors comblés.

Il y a des gens aux désirs, disons aux ordres et aux commandements desquels le Soleil, la lune et les éléments obéissent. Quel est le secret de leur pouvoir et de leur dignité ? Quel est le secret ? Le secret est simplement que les désirs de ces personnes ne sont pas des désirs personnels, ne sont pas des désirs égoïstes. Leurs désirs sont exactement semblables aux paroles d'un roi qui se tient au-dessus de tous les besoins et, remarquez, qui ne veut vraiment rien, qui prononce simplement une phrase ou parle de quelque chose pour le plaisir. Si la chose est faite, c'esttrès bien; si elle ne l'est pas, c'est très bien. Il se tient au-dessus de tous les désirs. Un roi qui n'a pas de désirs ne demande rien de personne, mais les courtisans et les gens autour de lui recherchent son plaisir. Il n'a aucun désir pour lui-même, mais il demande simplement à ses amis de faire quelque chose pour lui avec comme seul motif de leur plaire à eux et non à lui. Il est très satisfait et content en lui-même.

Ce sont ceux-là qui sont en quelque sorte des rois, des princes, qui se tiennent au-dessus de tous les désirs; et à leurs ordres seulement la terre, le Soleil et tout les éléments de ce monde obéissent. Ils sont au-dessus des désirs et leurs désirs sont satisfaits. Il vous suffit d'être au-dessus des désirs et alors les désirs seront satisfaits. C'est le secret de l'accomplissement des désirs.

Le Soleil fait tout en ce monde. Mais comment fait-il toute chose ? Comment cela se fait-il ? Parce que le Soleil est simplement un sakshi, il est simplement un témoin, un témoin dans sa gloire, tout comme un roi. Si un roi ou un prince vient ici, il n'aura pas à vous demander quoi que ce soit, mais tout le monde de son propre chef lui fera de la place, lui donnera un siège, de l'eau, du pain ou autre chose, lui offrira de l'argent ou d'autres choses, tout le monde, de son propre chef. De la même manière le Soleil fait tout ce que vous voyez. Tout ce que vous voyez, vous le voyez du fait du Soleil, tout ce que vous entendez, vous l'entendez du fait du Soleil. S'il n'y avait pas de Soleil, l'air deviendrait glacé, sans mouvement, et aucun son ne pourrait parvenir à vos oreilles. Du fait de la chaleur du Soleil vous jouissez du sens du goût. La chaleur du Soleil produit la végétation. Tout ce que vous sentez est dû au Soleil. La terre demeure dans sa forme actuelle du fait du Soleil. Tout est dû au Soleil, et pourtant il n'y a jamais eu de plainte contre le Soleil dans une cour de justice. Le voleur dérobe tout du fait du Soleil, mais il n'y eut jamais de plainte déposée au tribunal contre le Soleil.

Le Soleil, le sakshi, le témoin, le témoin neutre, le Soleil est un témoin neutre dans sa gloire et ainsi la terre continue-t-elle de tourner, de tourne et de montrer toutes ses parties au Soleil. Les planètes tournent et tournent autour, montrant tous leurs côtés au Soleil. Ainsi se fait-il qu'au moment même où le Soleil fait son apparition, les eaux viennent à couler des glaciers; c'est aussi en la présence du Soleil que les vents viennent à souffler, que l'herbe vient à pousser, etc... C'est pourquoi, en la présence du Soleil, tout vient et va. Pourquoi ? Parce que le Soleil est en position de témoin, de témoin neutre; il ne se mêle pas ou ne voyage pas avec les choses qui sont faites à travers lui, il demeure un témoin dans sa gloire.

Le Vedanta dit que si vous restez vous-mêmes dans cet état alors que vous vous déplacez dans ce monde, dans cet état de témoin dans sa gloire, d'intérêt neutre, ne prenant aucun intérêt personnel, égoïste, dans ce monde, ne prenant que l'intérêt du Soleil, pour ainsi dire, déversant l'éclat et la vie partout où vous allez, n'ayant aucun intérêt personnel, demeurant vous-mêmes dans la véritable gloire de Dieu-conscience, de la Divinité, "Je suis le même", restant vous-mêmes à la maison de la vérité dans le vrai Soi du soi, sans rien regarder du point de vue du petit ego égoîste intéressé, si vous faites cela, vous vtrouverez que vous êtes vous-mêmes le même Pouvoir Suprême aux ordres duquel toutes les puissances de ce monde doivent obéir.

Laissez toutes les misères, tous les problèmes, tous les plaisirs, toute la magnificence, toutes les richesses et toute la pauvreté et la dégradation de ce monde tomber sur vous de manière aussi douce et à la fois aussi parfaite qu'un paysage splendide tombe sous vos yeux. Tout comme le paysage passe devant votre vue, voyez tout clairement mais doucement. Cela ne vous pèse pas; çà n'est pas pesant pour les yeux. Vivez ainsi dans ce monde, voyagez autour, passez dans les rues de la vie sans être touché, la lumière témoin voyant tout clairement mais doucement, non accablé, non inquiété par quoi que ce soit. Si vous pouvez le faire, vous êtes le sage aux ordres de qui obéissent les pouvoirs de la nature. Vous êtes ce sage.

Elevez-vous au-dessus des désirs, et ils sont satisfaits. On dit : et la Loi du Karma ? Comment réconcilier la Loi du Karma avec le déterminisme ou les pouvoirs de la nature qui travaillent partout dans le monde ? En d'autres termes, comment réconcilier le déterminisme ou le fatalisme avec le libre-arbitre ?

On dit que les désirs qui sont en vous ne sont pas, en fait, vraiment des désirs spontanés, mais que les désirs en vous sont naturels, que ces désirs ne sont que des ombres des évènements qui arrivent qui doivent prendre place et venir passer dans le cours régulier de la nature; ils projettent leurs ombres en votre mental et apparaissent comme désirs.

Il y a une histoire sur une dame venue chez un photographe réputé pour qu'il prenne sa photo. L'opérateur mit sa caméra en ordre, en utilisant une plaque ultra sensible. Lorsqu'il examina le négatif, il trouva des traces de petrite vérole sur le visage. Il fut étonné. Qu'est-ce que çà veut dire ? Son visage est propre mais il y a des signes indubitables de cette maladie redoutée. Après des essais répétés pour obtenir une photo de la dame sans traces de petite vérole sur le visage, il abandonna, dégoûté, et demanda à la dame de revenir un autre jour, quand les conditions seraient meilleures et qu'il pourrait réussir à prendre une bonne photo d'elle. Quelle était la cause de cela ? Elle se rappela après coup avoir reçu une lettre de sa soeur qui était déprimée par la petite vérole, celle-ci avait mouillé l'enveloppe avec ses lèvres et l'avait fermée avec ses doigts. Lorsque la dame avait reçu la lettre, elle s'était infectée et était bientôt tombée malade. L'appareil photo l'avait détecté avec le matériel raffiné utilisé par le photographe, bien que l'oeil nu était trompé et ne pouvait voir la petite vérole déjà à l'oeuvre dans la peau.

Bien, ainsi sont les désirs, en fait, les marques de petite vérole vus dans l'appareil photo sasn avoir fait leur apparition sur le visage. Les désirs sont en fait une garantie de leur satisfaction. Les désirs ne sont que l'indication d'évènements qui arriveront à coup sûr.

D'un certain point de vue, toutes ces choses qui sont notre lot sont déterminées par notre environnement, par les circonstances et les influences venant de l'extérieur. D'un autre point de vue tous les désirs en nous nous apparaissent habituellement comme appartenant au libre-arbitre, ils doivent trouver leur accomplissement. Nous disons que nous sommes libres, et notre libre volonté est certaine de trouver son chemin. Ainsi libre-arbitre et déterminisme sont-ils réconciliés. En réalité les désirs sont déjà satisfaits. Mais comment et pourquoi cette souffrance ? Pourquoi ce prix que nous devons payer pour cet accomplissement ? C'est aussi nécessaire. Nous allons l'expliquer par une image.

Il y avait un homme qui écrivait une lettre à un ami dont il se languissait et qu'il désirait vivement voir. Il avait été séparé depuis longtemps de cet ami. La lettre qu'il écrivait était une lettre longue, longue, et il écrivait page après page. Il était si absorbé dans son écrit qu'il n'arrêta pas ni ne leva pas le regard une seule seconde. Il passa environ trois quarts d'heure sur la lettre sans jamais lever la tête. Lorsque la lettre fut terminée et signée, il leva la tête, et hop ! son ami bien-aimé se tenait devant lui. Il sauta sur ses jambes et, allant vers son ami, il l'embrassa en lui exprima son amour. Puis il protesta : "Es-tu ici ?" L'ami répondit : "Je suis là depuis plus d'une demi-heure." L'homme dit alors : "Si tu es là depuis si longtemps, pourquoi ne me l'as-tu pas dit ?". L'ami dit : "Tu étais si occupé, je ne voulais pas interrompre ton travail." C'est ainsi, c'est ainsi.

Vos désirs sont comme le fait d'écrire la lettre. Vous languissez, voulez, désirez, avez faim, soif et vous vous tracassez, tout cela c'est écrire la lettre et vous continuez d'écrire. Celui auquel vous adressez votre lettre, l'objet que vous désirez, est, selon la Loi secrète du Karma, déjà devant vous. Mais pourquoi ne le ressentez-vous pas, ne le trouvez-vous pas devant vous ? Parce que vous désirez, vous écrivez la lettre. Voilà la raison. Au moment-même où vous cessez d'écrire, où vous abandonnez votre lettre, vous trouvez tous les objets désirés devant vous. C'est pourquoi il devient absolument nécessaire de payer le prix.

Il y a des centaines d'histoires qui illustrent ce sujet dans les écritures Hindoues. Il y a une histoire indienne sur le premier ministre d'un roi, qui passa par toutes les pratiques ascétiques nécessaires pour voir la déesse de la fortune en chair et en os devant lui. Bien, il pratiqua tous ces mantras, incantations et charmes. Il répéta un million de fois les mantras sacrés calculés pour qu'il réalise la présence de la déesse Lakshmi. Elle n'apparut pas. Trois millions de fois il subit toutes les pratiques ascétiques, pourtant la Déesse n'était pas visible.

Il perdit toute foi en ces choses et renonça à tout dans le monde, prit le sannyasa et devint moine. Au moment même où il embrassa le sannyasa, quitta le palais et se retira dans les forêts, il trouva la déesse devant lui. Il s'écria : "Va t-en, déesse, pourquoi es-tu ici maintenant ? Je ne veux plus de toi. Je suis moine. Qu'a à faire un moine du luxe, des richesses, de l'argent et des jouissances du monde ? Lorsque je te voulais, tu n'es pas venue; maintenant que je ne te désire pas, tu viens devant moi." La Déesse répondit : "Tu te tenais toi-même sur le chemin. Aussi longtemps que tu désirais, tu affirmais la dualité, tu faisais de toi un mendiant et cette sorte d'être ne peut rien avoir. A l'instant où tu t'es élevé au-dessus des désirs et les a éperonnés, tu es devenu Dieu, et à Dieu appartient la gloire." Tel est le secret.

Om ! Om ! Om !