Utilité de la vie conjugale

Swami Rama Tirtha

(Conférence donnée le 18 décembre 1902 aux U.S.A.

(Traduction : Gaura Krishna)

 

Mon propre Soi sous forme de Mesdames et Messieurs;

Quelques objections aux enseignements du Vedanta ont été portées à la connaissance de Rama. Quelqu'un a dit l'autre jour que si c'était la philosophie des Hindous, nous pouvons alors très facilement voir les causes de la chute politique de l'Inde. Un autre homme a dit à Rama que si les enseignements des Hindous, à savoir le Vedanta, cette philosophie, cette religion, était la religion et la philosophie la plus sublime du monde, comment se fait-il que l'Inde soit plongée autant dans l'ignorance et que les pays chrétiens soient si prospères ?

Rama ne va pas répondre maintenant à ces questions, parce que si l'on parle de ces questions, on devrait alors laisser tomber le sujet promis. Mais on parlera de ces questions dans des conférences à venir, et il y sera répondu d'une manière telle que tous les gens seront stupéfiés. Les gens qui pensent que le Vedanta est la cause de la chute de l'Inde seront simplement surpris d'entendre les réponses. Nous n'avons pas le temps d'entrer maintenant dans ces questions. Rama demande seulement à tous ceux à qui il arrive d'écouter quelque chose des enseignements de ne pas être impatients, de ne pas sauter immédiatement à des conclusions. Rama veut qu'ils aient un peu de patience et qu'ils écoutent le conférencier jusqu'au bout.

Dans l'Alcoran, la Bible des Mahométans, il y a un passage qui dit ceci : "Abandonnez-vous à l'iniquité, au vice, dévouez vos vies à la boisson et à la sensualité et vous travaillez à votre propre ruine; vous travaillerez alors à votre propre ruine." On vit un mahométan boire du vin et courir après les plaisirs de la chair et jouir de désirs charnels. Un prêtre mahométan vint le voir, et en lui faisant des reproches il lui dit de ne pas se comporter ainsi, parce qu'il violait les règles posées par leur prophète; et alors cet ivrogne récita immédiatement la première partie du verset de l'Alcoran et dit : 'Ecoutez. L'Alcoran dit : "Buvez, amusez-vous et abandonnez-vous à la sensualité.' C'est la lecture exacte de l'Alcoran, notre Ecriture, notre Bible. L'Alcoran, l'Ecriture nous enjoint la boisson et la sensualité, pourquoi ne devrions-nous pas ?"

Le prêtre dit alors : "Frère, frère, que fais-tu ? Lis aussi la partie qui suit : 'vous travaillez à votre propre ruine.' (c'était la deuxième partie du verset). Lis aussi la seconde partie." L'ivrogne répondit : "Il n'y a pas un homme à la surface de la terre qui pourrait mettre en pratique l'entièreté de l'Alcoran. Laissez-moi mettre en pratique cette partie-là. Personne n'est supposé et on n'attend de personne qu'il mette en pratique tous les enseignements de la Bible. Certains ne peuvent mettre en pratique qu'une petite partie et certain une plus grande; c'est tout. La totalité, personne ne la met en pratique, alors pourquoi attendez-vous de moi que je mette en pratique la totalité du verset ? Laissez-moi d'abord jouir de la première partie du verset."

Aussi Rama demande-t-il simplement que la logique ou la philosophie de cet ivrogne mahométan ne soit pas employée; la totalité du verset doit être lue, et alors on tirera la conclusion, pas avant.

Rama avait un jour une montre en or; parmi les breloques attachées à la chaîne, il y avait une montre-jouet, une vraie boussole. Elle ne marchait pas, mais en ajustant l'aiguille d'une certaine manière, elle pouvait sonner une heure. Toujours une heure, pas de place pour la dualité. Vous êtes cet Un(e); tenez-vous au-dessus du temps, de l'espace et de la causation; ils sont tous gouvernés par vous et non vous par eux - ils sont les serviteurs de votre imagination - deux et trois sont irréels, - l'Un est libre de l'esclavage du temps.

Q.- : Un homme marié peut-il aspirer à la réalisation ?

En répondant à une suggestion de mettre cela de côté, c'est le sujet choisi par Rama qui a suivi à la place. Rama dit que tout sujet est celui de Rama. Celui-ci, si on le prend à fond, vous fera beaucoup de bien - mais il est surprenant, vous devez l'écouter totalement. Peut-être peut-il sembler étrange aux gens de ce pays. Mais Rama n'en a cure, il ne respecte que vous.

Le Vedanta dit, en réponse à cette question : "Certainement, un médicament est offert au malade et non à celui qui est en bonne santé."

Le plus impliqué dans le monde et dans ses danger en a besoin plus que tout. Un homme célibataire ne peut pas réaliser aussi facilement que celui qui est marié et qui mène une vie de famille de la bonne manière; mais en étant insouciant il ne peut pas réaliser et il est entraîné vers le bas. La négligence de la connaissance de la véritable relation entre mari et femme conduit à beaucoup de malheur. Pourquoi un sujet si important et cher au coeur doit-il être évité ? On ne parlera pas maintenant d'un aspect de cette question : la préparation au mariage,; c'est un grand sujet et on en traitera dans une conférence postérieure.

Après le mariage de Rama, lui et sa femme vécurent des vies de célibataires pendant deux ans, c'est un fait, et non une simple parole.

Le mariage n'est pas préjudiciable, seule la faiblesse à qui l'on peut permettre d'y gouverner est en vérité nuisible; des éléments avilissants : la peur, l'attachement aux objets, à la forme, et le renforcement de l'idée 'je suis le corps, ma compagne est le corps', un ardent désir, un sens cupide de possession.. Si cela doit être la manière dont on observe les relations matrimoniales, alors un homme ne pourra jamais réaliser.

Pénélope, en enroulant et en déroulant, comment son travail pouvait-il être jamais terminé ? Comment cet homme peut-il progresser quand il défait constamment ce qu'il a gagné ? Le Vedanta dit sans peur que vous devez être inspiré par la force, saturé d'amour supérieur, relevé de l'humiliation et de l'abaissement de ce qu'on appelle faussement amour, élevé au-dessus de la conscience du corps. C'est le processus d'enroulement. Quand vous ne voyez que le corps dans votre mari ou dans votre femme, tout est défait ! Comment pouvez-vous progresser ? S'ensuit-il que les gens ne doivent pas se marier ? Non, mais l'usage du mariage doit être différent. Saisissez-vous des enseignements du Vedanta. Fait du mariage un moyen de vous élever, il devient alors une aide importante. La pierre d'achoppement devient une pierre de gué. Quand le mariage est esclavage de la passion, chaque fois que vous êtes satisfait, la servitude s'intensifie, vous coulez de plus en plus bas.

Les prophètes parlent contre les femmes, ils disent : "Elle est une porte vers l'enfer." Rama diffère. Un homme qui marche dans la rue (une bouteille de vin sortant de sa poche) rencontre un prêtre, lui demande le chemin de la prison, souhaite la visiter, comme Rama l'a fait la semaine dernière. Le prêtre à un bâton à la main et il en touche la bouteille. "Frère, c"'est le chemin le plus court, il vous y guidera de manière certaine." Ainsi parle-t-on de la femme. Le monde est une prison : le mariage moderne vous y conduit de manière certaine. Si l'homme et la femme causent la chute l'un de l'autre, pourquoi le même Dieu, qui a écrit la Bible, écrit-il une Bible de ce genre dans le coeur de l'homme pour rechercher la femme ? Une contradiction. Il y a un sens secret dans ce lien. C'est l'ignorance qui en fait un moyen de perdition. On doit seulement blâmer cela, pas la relation conjugale. Comment l'ôter, c'est la question. Voici un chiffre : zéro (illustration donnée). Si le zéro est placé à droite du point décimal, sa valeur décroît, si c'est à gauche, elle croît. Le zéro n'a aucune valeur si ce n'est dans sa relation ou dans sa position. De même votre position en la matière détermine la valeur de la relation.

Pourquoi un homme prend-il du plaisir dans sa femme ? Cela doit être examiné ou la difficulté ne peut être résolue. C'est ce plaisir qui rend les hommes esclaves. La guerre de Troie en donne un exemple. C'est ce qui ait d'une fille une héroïne et pas une autre. Il est faux de dire que ce plaisir vient de la femme elle-même. Nous devons comprendre la fausseté qu'il y a là-dedans. Il n'y a aucun plaisir en elle ou dans le corps.

Si tout le plaisir était centré dans l'objet d'Amour, alors femme et mari seraient toujours une source de bonheur l'un pour l'autre. Mais nous savons que çà n'est pas vrai. Après avoir récolté votre plaisir, dans quel état vous trouvez-vous ? Conscient qu'il n'y a plus de plaisir. Lorsque vous êtes impuissant, est-elle une source de plaisir ? Quand votre compagne est malade, quand elle est infidèle, quand vous êtes malade, aucun plaisir ne réside en elle. Vous avez là deux entités séparées : la dualité. Quand elles sont absentes, il y a unité parfaite, non seulement du corps mais aussi du mental et de l'âme, alors vient un état qui ne peut être décrit. Le corps n'existe pas, le monde n'existe pas; union, paradis, liberté, absence de peur, parce que non dualité : l'identité, l'unité existe. L'annihilation du monde, il est complètement détruit ! Une illusion qui n'existe plus, je ne suis pas le corps, ni elle; au-dessus du corps, du mental, du monde, le Paradis retrouvé, le but atteint, aucune état, aucune condition ! Cela implique toujours qu'il y ait quelque chose d'autre de présent. le Vedanta dit que vous êtes alors Pouvoir et Béatitude, votre véritable Atman. Vous êtes cela : affirmation surprenante ! Lorsque le positif et le négatif forment un cercle parfait, alors la lumière entre comme une lampe électrique lorsqu'elle est complètement allumée. Dans vos corps une seule dynamo différencie; le circuit électrique est complété, les pôles se rejoignent, et l'état normal et originel est restauré ! Béatitude, absence de crainte, pouvoir créateur, Dieu présent ! c'est le véritable Soi originel, et nous pouvons alors dire : "Cet homme est Fils de Dieu". Quand mari et femme se confondent dans le principe fondamental, tout s'y fond, le monde entier disparaît : totalement mangé par l'Atman, toutes castes, couleurs, croyance sont comme du riz dont la mort est l'assaisonnement. L'Atman le mange entièrement, car l'Atman est le pouvoir créateur.

Nous voyons d'un autre côté, selon le Vedanta, l'homme ignorant, qui ne sait pas, tomber amoureux de l'apparence extérieure, de l'objet irréel, être cause que l'Atman est méprisé et qu'on ne pense qu'aux signes extérieurs.

Un homme voit dans un bois un livre sur le sol; un éclair se produit; il pense par ignorance que le livre est la cause de l'éclair, on ne peut l'en dissuader, il voit ces deux choses ensemble et il pense que l'un cause l'autre, étant associées dans son esprit. De même un homme trouve le bonheur dans l'union qui en vérité n'est pas causé par l'homme ou par la femme, mais par la réalité de Dieu.

Quel usage faites-vous de ce fait ? Vous devez réaliser sur le champ que lorsque le mental enlève la matière et la sensualité et ne pense qu'au bonheur qui est une force, un pouvoir, le Soi véritable, il n'est nul besoin de descendre dans le mental inférieur qui disparaît : il est ce Principe Divin, qui est le Soleil, la Lune, le Pouvoir, l'Infini, au-delà de la causation, du temps, de l'espace, un océan dan lequel tous les objets sont comme des vagues, des rides, des tourbillons - formes du principe réel, basique, fondamental -vos corps sont ces rides et ces vagues, la seule cause de différenciation est la forme. Un enfant qui regarde une rivière dit : "Regarde, frère, une vague déferlante arrive !" Il y a déjà de l'eau, mais la prééminence est donné au phénomène. "Je vais te montrer une déferlante, pas une rivière !" Exactement comme ici, un unique Dieu indivisible ! Soleil, Lune, corps et rides résonnent dans l'océan de la mentalité - meum et teum -, ainsi l'homme introduit la pluralité, qui entre dans les phénomènes, les corps se heurtent, les rides se contrarient l'une l'autre. Si le plaisir ne doit venir que de u heurt des objets, c'est alors une erreur; mais c'est la présence de l'Atman, l'eau, qui se manifeste lorsque les vagues se brisent. Le Vedantin souhaite enseigner à l'enfant ce qu'est l'or, lui monter un anneau et dire : "Voici de l'or". L'enfant dit : " La rondeur est-elle de l'or ?" Non. "La couleur est-elle de l'or ?" Non. "La douceur ou le poids ?" Non. Non. Comment donner une idée ? Un autre objet, aussi en or, est montré, l'idée est enfin extraite - il la réalise. Identifiez les attributs et travaillez-les dans la vie.

Le Roi demanda à Birbal qui était en majorité, les aveugles ou les voyants. Il y eut discussion, et il fut décidé d'en faire la preuve. Le roi pensaient que les aveugles étaient en minorité. Aussi Birbal vint-il avec comme preuve un morceau de tissu et, l'enroulant autour de sa tête il demanda : "Qu'est-ce que c'est ?" "Un turban" fut la réponse. Il le mit sur son épaule et demanda aux gens : "Qu'est-ce que c'est ?" "Un châle" fut la réponse. La troisième fois il le porta comme un vêtement autour des reins et il l'appelèrent ainsi. "Aveugles, vous êtes tous aveugles. Cà n'est rien de ces choses, mais du tissu" - le tissu est dissimulé par les noms et par les formes.

Réalisez ce qu'est l'Atman : pour voir l'or vous n'avez pas besoin de le casser. Lorsque vous pensez à l'homme, aux femmes, aux tourbillons, aux déferlantes, au tissu et à l'or, vous ne pensez pas à la Réalité qui est derrière.

Ne dites pas que le mariage est contraire à la religion. Voyez ce qu'est le véritable état de bonheur, ce qu'est le véritable Soi, comme un homme qui aspire à la réalisation médite sur la vraie Béatitude, sur la Réalité et sur le Principe Fondamental. Quand vous perdez conscience de l'identité avec le Soi réel, méditez, éradiquez la cause de l'esclavage et sombrez ainsi dans la Réalité.

Om - Cela je le suis - vérifiez. "Est-ce cela ma nature réelle ?" "Suis-je Cela ?" Si je suis Cela, le monde n'est qu'une ride; pourquoi devrai-je en avoir envie ? Dans la conscience du corps, il y a la luxure, le désir. Discutez avec vous, le Principe Fondamental. A partir du plexus le courant de volonté monte ainsi de plus en plus haut, la pression s'élevant par le cerveau continue de monter. La passion diminue par un processus naturel - tout ce qui est conquis diminue. Pourquoi ? Parce que dans le soleil enflammé aucune lumière électrique n'apparaît. Ce n'est que dans l'obscurité qu'elle brille et donne de la lumière.Amené graduellement dans le soleil brillant le plaisir sensuel, comme une lampe, ne répand aucun rayon.. Il est contre nature d'abuser et de dénoncer. Vous ne pouvez pas écraser ceci si ce n'est en vous élevant au-dessus : utilise les moyens et élève-toi, Frère !

Le monde lui-même est un miracle. Il n'est nul besoin d'autres miracles. La peur est la cause de tout péché qui n'est ôté qu'en connaissant l'Atman. Réalisez la pureté et devenez pur. Il est anormal d'enseigner une autre religion.

Viens ou ne viens pas
Tu es en Moi.
Reste près, reste loin, où que tu sois,
En moi tu es, en Moi tu bouges,
Non, Moi est Toit.
Dissous-toi en Moi, et sois la Mer de Béatitude.
Donneur et non chercheur :
Participant à ma nature, et sois heureux.

La méthode logique, scientifique et naturel pratiquée en Inde est que la femme aide le mari et qu'elle ne le gêne pas.

Après que Rama ait eu réalisé, il vécut la vie de famille deux années de plus. On parlait à sa femme de Vedanta et elle apportait des fleurs, les lampes et est devenue absorbée dans le Soi. Elle s'agenouillait et adorait, puis regardait Rama jusqu'à ce que son corps devienne pour elle un emblème, elle chantait Om, pensait à l'Atman en Rama, et voyait Dieu en elle-même, elle émettait ces pensées, chacun voyait Dieu en l'autre, ils s'aidèrent ainsi mutuellement et ils obtinrent la réalisation. Rama aida à l'élever. Cela continua quelque temps, puis ils passèrent des mois ensemble, aucune idée de basses pensées ne leur venait, la passion avait été conquise, il y avait une compréhension mutuelle; les deux étaient libres. Toute idée de mari et de femme était perdue, il n'y avait aucun esclavage. Elle ne le considérait pas comme son mari ni lui comme sa femme.

Les problèmes domestiques sont causés par l'étroitesse des idées et de la possession. C'est alors que les intérêts s'affrontent et que les entraves du mariage apparaissent. Comprenez le Vedanta et soyez libre ! Il n'y a aucuns liens que de noms. Chacun est destiné à être libre. Permettez à vos enfants d'être absolument libres. Cela ne fait jamais de tort à un homme. Le monde entier est un paradis, et Dieu ne sera jamais trompé.


Om ! Om ! Om !