"Qu'elles aillent au Kailash. Ce mendiant va prier
Père pour qu'Il les protège et les guide."
Tels furent les paroles de Yogi Ramsuratkumar, Dieu-Enfant de
Tiruvannamalai, qui arrivèrent par télégramme
à Come en Italie et qui nous donnaient le OK pour notre
yatra, notre grand pèlerinage au Kailash, la montagne la
plus sacrée du monde, un bijou de pure beauté dans
l'isolement le plus inaccessible du Tibet occidental.
Nous avions connu Yogi Ramsuratkumar une année avant, en
1991 : juste quelques jours passés à ses pieds dans
le petit abri où il avait l'habitude de vivre, en plein
milieu de la ville. Jours inoubliables : en dehors du temps, de
l'espace, de l'histoire. Dans cet abri il y avait la Réalité,
et le monde restait dehors.
Le temps était si inexistant que le matin de notre départ
de Tiruvannamalai, nous sommes allés le voir à cinq
heures, et le Yogi était déjà là,
prêt à nous bénir encore et encore, profusément
: non seulement pour notre retour chez nous, mais pour les années
à venir.
Lorsqu'un jour on nous offrit l'occasion de visiter le Kailash,
le défi était extraordinaire, mais aussi aux limites
de nos possibilités physiques. En un mot, nous étions
apeurées. Comment pouvions-nous imaginer passer une la
dureté d'un telle désert si l'une de nous particulièrement
(Olga) avait de sérieux problèmes de santé.
Olga savait elle-même que les véritables pèlerins
sont prêts à mourir sur leur chemin. Mais il n'était
pas question dans ce cas-là de vivre ou de mourir : le
problème était qu'elle pouvait devenir un handicap
sérieux pour les autre membres de l'expédition.
D'où l'idée de demander à notre Yogi, et
sa réponse positive immédiate. Avec un tel saint
qui allait lui-même aux pieds du Père pour implorer
protection, comment pouvions-nous encore avoir peur ou même
douter ? Nous nous sommes juste abandonnées et nous sommes
préparées pour notre yatra.
Le jour même de notre départ, Olga se réveilla
en se sentant si souffrante qu'elle dut immédiatement être
emmenée chez le médecin. Mais aucune d'entre nous
n'a même demandé s'il lui fallait rester chez elle.
Nous sommes toutes parties puisque c'était la seule chose
correcte à faire.
Des jours de courage allaient venir : nous devions nous débrouiller
avec les éboulements, les ravins, les températures
bien en-dessous du point de gel, les hautes altitudes toujours
entre 4.500 et 4.800 m. Le point le plus haut que nous ayons à
escalader pendant notre pradhakshina autour de la Montagne sacrée
- le Dolma La, la passe nommée d'après la déesse
de la Compassion - nous accueillit avec une tempête de neige
soudaine et rude. Notre sirdar, le chef de nos Sherpas, nous cria
dans le vent : "Me'm sahib, partons vite d'ici ou nous allons
mourir ! " Mais, de nouveau, aucune de nous ne fut effrayée
ni ne douta. "Quelque chose" ou "Quelqu'un"
nous aidait tout le temps, au point que nous pouvions non seulement
surmonter toutes les difficultés, mais simplement nous
ne nous posions aucune question.
Près de nous, marchant avec nous, nous accompagnant
tout le temps, nous ressentions une Présence. Elle était
si forte que nous étions souvent forcées de tourner
la tête pour voir qui était là. C'était
la même perception que celle que vous avez quand, alors
que vous êtes dans une pièce, vous savez que quelqu'un
se trouve derrière vous, vous regarde, mais que vous ne
pouvez pas le voir ou la voir. C'est une question de champs magnétiques
qui se rencontrent. Vous sentez que vous n'êtes pas seul.
Autour du Mont Kailash, nous avons eu toutes les trois exactement
la même expérience : nous étions accompagnées
par un Compagnon Invisible qui savait quoi faire dans n'importe
quelle occasion, aussi inoffensive ou nocive qu'elle pût
être. Nous avions simplement confiance : chacune de nous
marchait comme un enfant main dans la main avec son père.
Aucune question, aucun souci : "Père sait."
L'un des traits les plus saillants de ce yatra, à côté
des merveilles incomparables du paysage, à côté
de la profonde sacralité de l'endroit, à côté
de la santé d'Olga qui fleurissait mystérieusement
au milieu des contraintes physiques est, maintenant, dans nos
mémoires, cette Main chaude qui nous bénissait et
nous protégeait constamment, et cette Présence est
Sri Yogi Ramsuratkumar.